Still Life of Memories (2018)

Le résumé de Still Life of Memories (2018, Hitoshi Yazaki) n’est certes pas compliqué à faire : un photographe d’art se voit un jour proposé par une admiratrice un nouveau projet : photographier son vagin, et uniquement lui.

Je précise qu’il ne s’agit pas un film d’une nouvelle opération “Roman Porno Reboot” mais d’un film indépendant tout ce qu’il y a de plus sérieux et exigeant. Car avec un tel sujet, une telle lenteur et un tel dépouillement (par exemple pas la moindre musique), il faut, comme on dit, “entrer dedans”. Autant la maestria de Drive My Car faisait que l’on s’enquillait les trois heures sans sourciller, autant là, les presque deux heures se font parfois ressentir. Mais on arrive malgré tout à la fin au bout du tunnel (au sens premier comme au figuré, et même doublement figuré), notamment grâce à une excellente photographie, c’était bien le moins à attendre pour un film ayant pour sujet la photo d’art. Intérieur (le musée, la maison où habite l’étrange cliente) comme extérieur (la forêt, le lac) sont très plaisants aux yeux, surtout quand vient s’y inscrire un érotisme obligé.

Ajoutons à cela un minimum d’intrigue pour aider à prendre son mal en patience et même peut-être, ressentir un peu de fascination pour cette histoire. Il s’agit ici de révéler pourquoi cette cliente est obsédée à l’idée qu’un photographe mitraille son vagin. A côté de cette noble mission artistique (mission qu’un photographe français, Henri Maccheroni, a d’ailleurs accomplie), la petite amie du photographe, enceinte, s’inquiète de ses absences répétées et ne sait pas trop comment prendre la chose quand il lui révèle son nouveau projet. Se dessine alors un étrange triangle (qui n’est pas celui du pubis photographié) qui fusionnera le temps d’une scène (n’imaginez pas n’importe quoi, le film est relativement chaste), lors de deux scènes qui, par leur juxtaposition, m’ont fait penser à du Naomi Kawase.

“Respect the cock and tame the cunt !” ordonnait le personnage de Tom Cruise dans Magnolia. Là, ce serait plutôt “vénérez la chatte”. Car derrière le projet photographique qui apparaît au début un rien suspect, voire morbide, finit par résonner un véritable hymne à “l’origine du monde”, évidence qui apparaîtra de manière cocasse au photographe lors de l’ultime scène.

Lent et austère, oui, Still Life l’est mais, pour peu que l’on apprécie Araki, Courbet, Naomi Kawase et la photographie, le voyage dans ce film exigeant peut valoir le coup.

Bande annonce ici : https://mubi.com/fr/films/2018-hitoshi-yazaki/trailer

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4 Commentaires

  1. Tiens, tu me rappelles que j’avais pu échanger quelques mots avec Yazaki à l’issue d’une projection de « Love and Treachery » à la MCJP en 2011… La veille ou le lendemain de la projection de « Cold Fish » avec Sion Sono et Megumi.

    Pas un film inoubliable, mais un gars intéressant et ouvert au dialogue critique.

  2. J’essaierai de retenter prochainement un film de lui. Pas l’impression que l’on trouve des s-t anglais pour ton Love and Treachery. C’est dommage, certains screens avaient l’air aguich… prometteurs.
    Je crois que c’est « Strawberry Shortcakes » le plus connu. Ce sera peut-être le prochain.

  3. Sinon, tu as pu serrer les mains de Meg (comme un otaku avec une idol) ?

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