Takeshis’ (Takeshi Kitano – 2005)

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Beat Takeshi est un acteur renommé. Un jour, il rencontre un homme lui ressemblant comme deux gouttes d’eau et se nommant comme lui Kitano. Ce personnage qui passe des auditions pour essayer de décrocher des petits rôles est en fait un modeste employé de convini qui, tout le long de ses journées, doit subir pas mal de vexations. Petit à petit, le personnage va laisser son imagination l’envahir et rêver à ce que serait se vie s’il était lui-même Beat Takeshi…

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L’heure est venue pour moi de retenter l’aventure de la trilogie sur la création (Takeshis’, Kantoku Banzai et Achille et la Tortue). Un peu comme avant de revoir Getting any?, je sens monter en moi l’inquiétude. Sera-ce supportable ou véritablement une douleur sans nom ? C’était tout la question avant de revoir Takeshis’ dans des conditions HD. Eh bien, si je me souviens que le visionnage à l’époque avait été une bonne surprise, je m’aperçois dix ans plus tard que rien n’a changé, je reste admiratif du résultat et continue de ne pas comprendre que ce film soit parfois pris de haut. Sans être un chef-d’œuvre, il reste une œuvre intéressante pour le connaisseur de Kitano et de son œuvre. Pour les autres, franchement je ne sais pas. Peu importe finalement. Ce que j’aime en fait (et trouve louable) dans ce film, c’est ce refus de servir la becquée au spectateur en lui délivrant un mode d’emploi. C’est obscur, pour ne pas dire abscons, et c’est justement ça qui est bon, nous mettant à des années lumière d’un insipide biopic sur la trajectoire d’un artiste. Démarche en tout cas culottée de la part d’un auteur à l’époque en passe d’être quasi sacralisé et qui décide de balancer ce film à la face du public, notamment celui de la Mostra de Venise en 2006.

Et à la revoyure, le film m’est apparu beaucoup moins confus qu’il n’y paraît au premier abord. Avant d’aller plus loin, petit résumé de la structure façon poupée gigogne (ou « fractale », titre qui à la base avait été imaginé par Kitano) de Takeshis’ :

1) Durant une scène de bataille de la seconde guerre mondiale, un soldat japonais méchamment blessé voit apparaître des soldats américains. L’un deux avance vers lui et le regarde.

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2) Beat Takeshi joue dans un film de yakuza :

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3) Beat Takeshi dans sa vie de tous les jours. Avec sa jeune et jolie compagne du moment, son imprésario, ses amis, ses fans, etc.

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4) Le tournant du film : Beat Takeshi rencontre son sosie (appelons-le M. Kitano) et lui offre un autographe.

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5) Nous pénétrons désormais dans la vie de tous les jours de M. Kitano.

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6) Entrée dans un nouveau monde : la psyché de M. Kitano qui se rêve être Beat Takeshi.

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La partie onirique du film est amorcée avec la scène du taxi et culminera avec celle du concert et surtout celle de la plage. Après, le film reviendra petit à petit à son point de départ avec la scène du soldat américain.

***

Expliquer de fond en comble serait périlleux tant le film est conçu pour être vu et revu, n’appelant pas une interprétation unique mais au contraire une multitude. Conseil d’ailleurs donné par Kitano lui-même lors d’une interview à sa sortie : « voyez-le une fois, puis une deuxième avant même de commencer à l’analyser ». Conseil aussi de le vivre comme une expérience et pas comme un objet rebutant parce que fuyant par trop les sentiers battus. Le film peut ainsi être vu (et apprécié) comme un trip hallucinatoire de la même eau que certains films de Lynch, trip où réel et rêve s’interpénètrent et se confondent de manière inextricable dans ce qui est donné à voir. Le film fait 1H45, c’est une durée bien pensée pour se fondre dans ce projet qui tenait à cœur Kitano tout en empêchant un effet de lassitude, pour peu que l’on sache garder ses sens et son intellect en alerte, que l’on fasse preuve d’un minimum de curiosité devant des détails ne cessant de revenir à travers les différentes strates narratives du récit.

Car si l’on s’attarde sur certains détails, il est alors très agréable de laisser vagabonder son imagination et de réfléchir à des interprétations possibles.  Inutile de dire que l’article s’adresse surtout à ceux qui l’ont déjà vu. Pour les autres, vous pouvez lire, je pense que les spoils ne seront de toute façon pas décisifs pour vous dégoûter de le voir. Vous n’y comprendrez sans doute pas grand-chose mais peut-être que cela éveillera votre curiosité et vous donnera envie de vous plonger dans ce film unique. D’une manière générale, ignorez le lieu commun qui consiste à dire « Kitano, après Hana Bi, c’est plus rien que de la merde ». Takeshis’ est la preuve que non, ce qui vient après Hana bi est loin d’être à jeter.

Bref, voici pêle-mêle quelques idées qui me sont venues lors de ce nouveau visionnage et qui me semblent baliser le puzzle de manière à le rendre moins obscur. Peut-être pas les clés définitives, mais des idées qui m’ont permis de mieux me confronter à ce deuxième visionnage de Takeshis’.

1) Sur le soldat américain

Ce visage pas forcément inamical et filmé en contre-plongée peut renvoyer à l’enfance de Kitano, à une époque où l’occupation américaine permettait de rencontrer des GI’s amicaux distribuant sucreries et chewing gum aux petits enfants. Kitano a pu expliquer dans une interview que cette dichotomie entre « ennemi » et « mec sympa » avait toujours suscité en lui une sorte de malaise et qu’il avait essayé dans cette séquence de le retranscrire. Rien n’indique ici que les personnages sont en train de tourner un film. Seule l’époque constitue un indice permettant de manière symbolique de commencer par le commencement : la seconde guerre mondiale, terreau de la naissance de l’artiste. Mais on peut y voir aussi une deuxième interprétation, en lien avec le thème qui suit.

2) Sur le showbiz

A un autre niveau, comme le film est aussi constitué par une satire du showbiz et d’une certaine américanisation du spectacle.

La chanson est figuré par Akihiro Miwa (artiste travesti, amant de Mishima, ayant commencé comme Kitano dans les cabarets). Il est tout de suite montré takeshis-8comme quelqu’un de passablement capricieux.  « Tu ne penses jamais à la valeur artistique, tout ce qui t’importe est le budget », reproche-t-il à son producteur, avant de lui demander de réclamer plus d’argent au sponsor. La scène est ambiguë : veut-il réellement plus d’argent en faveur de « l’art » ou est-ce une petite hypocrisie pour se permettre toujours plus de largesse dans un train de vie que l’on devine plus que confortable ? La luxueuse voiture dans laquelle il s’engouffre, mais surtout ce plan juste avant où l’on voit une chenille sortir d’un bouquet offrir à Kitano ferait pencher pour la deuxième hypothèse. Le ver est dans le fruit et Miwa semble à des années lumières de ce qu’il a été dans sa jeunesse, à savoir juste un artiste pas encore habitué à voir exaucés les moindres de ses caprices. Qu’il réapparaisse d’ailleurs sous une forme plus glorieuse dans la séquence onirique du cabaret n’est sans doute pas innocent. Mais la première hypothèse reste possible et dans ce cas, c’est Kitano lui-même, traité de « monstre » par Miwa, qui incarne l’artiste vendu à l’argent, aux concessions faites à l’art.

Après, nous avons des danseurs de claquettes et un DJ. Dire qu’ils participent à une sorte de décadence du spectacle japonais serait sans doute excessif. Mais ils apparaissent comme des pratiques artistiques qui s’intègrent sans peine au monde du spectacle dans lequel évolue Kitano, contrairement au garçon pratiquant le taishu engeki :

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Que ce soit ce garçon ou les danseurs de claquettes, il est criant qu’ils possèdent un certain talent dans leur pratique. Mais si le producteur du premier semble ramer pour trouver une place importante à son protégé, les trois danseurs (qui font d’ailleurs penser aux danseurs modernes dans Kikujiro mais aussi au numéro final de Zatoichi) semblent intégrés.takeshis-11 Apanage sans doute d’une pratique d’origine américaine mais aussi porteuse de plaisir aux yeux de Kitano qui nous est montré par deux fois essayant d’esquisser quelques claquettes. Elles sont évidemment très différentes de celle, plus explosives, des trois jeunes artistes. Mais pour maladroites qu’elles soient, elles apparaissent touchantes, comme le signe d’une nostalgie d’une époque où le spectacle moins contaminé par les « chenilles ». Rappelons que Kitano a commencé dans les cabarets d’Asakusa et que les claquettes faisaient partie de la palette de l’apprenti comique.

Après, tout en gardant en tête cette histoire d’américanisation du showbiz, la magnifique scène de la plage me paraît décisive. D’un côté nous avons Kitano dans ce costume de gangster surarmé, de l’autre une armée de CRS envoyant pour le vaincre des personnages spécifiquement japonais : des samouraïs, des sumos et des étudiants révolutionnaires de l’armée rouge unifiée.

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Ils se feront tous dessouder et le plan à la quasi fin du film, montrant le visage du soldat américain regardant Kitano mais cette fois-ci le menaçant de son fusil, plan précédant la scène de film de yakuza, donne l’impression que Kitano se retrouve coincé, obligé de faire un type de film ayant contribué à sa renomméetakeshis 13 internationale. Rappelons aussi l’existence de Brother réalisé cinq années auparavant sur le sol américain, aventure hollywoodienne qui déçut Kitano, notamment par le fait que les considérations liées au fric l’emportaient sur les considérations artistique, en tout cas bien plus qu’au Japon. Bref, un canon de fusil sur la tempe Kitano semble nous suggérer que son destin est tout tracé : faire ce qu’on lui demande, à savoir des films de genre pas trop compliqués et qui rapportent du fric. L’opposé de Takeshis’s en somme.

3) Sur ce qu’est un artiste

Après, admettons que l’américanisation ne soit pas forcément en ligne de mire. Admettons que la charge ne porte pas sur les jeunes artistes américanisés qui font des claquettes ou du scratch. La scène du cabaret est relativement longue, comme si Kitano voulait insister sur quelque chose. Par un clin d’œil aussi malicieux que fugitif, il opère un nouveau clin d’œil à ses années de cabaret à Asakusa, à une époque où il bossait aussi dans des boites de strip-tease. Art et sexualité étaient alors mêlés :

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Et oui, faire l’amour à une femme, c’est aussi quelque part faire du scratch sur de la matière vivante ! Bien entendu, la juxtaposition des images évoquent aussi les femmes que l’on peut se payer à partir du moment où l’on est riche et célèbre. Ici, c’est surtout le personnage joué par Kotomi Kyono qui incarne cet aspect.

Du coup nous nous trouvons dans une scène matricielle, renvoyant aux débuts de Kitano, à une époque où il s’agissait de maîtriser son art pour vivre et où il n’y avait pas à frayer avec toutes les magouilles, et toute la faune gravitant autour du showbiz (cf. le personnage emblématique de la femme désagréable ettakeshis-14 incompétente, qui abuse de son pouvoir). Le cabaret est une sorte de micro univers indépendant de l’emprise du showbiz de « haute volée ». On est à la fois dans un merveilleux exubérant et dans une virtuosité liée à la performance exécutée en live sous les yeux d’un public, virtuosité qui atomise l’artificialité liée aux conditions de réalisation du cinéma (une énigme cependant : la présence de cette grotesque chenille sur scène : volonté de faire la satire du showbiz ou, toujours la même chose, représentation d’un vers déjà dans le fruit ?).

Et la scène de la plage a dès lors un tout autre sens : l’armée bigarrée de gars en costumes qui foncent pour trucider Kitano représentent évidemment le cinéma lui-même, sorte d’armée faite pour écraser tout sur son passage et auquel résistent quelques irréductibles. Kitano bien sûr :

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… mais il est aussi significatif de voir que le garçon faisant du taishu engeki soit derrière lui et non pas dans le camp de l’armée costumée. Deux fois on assiste à la même scène : l’imprésario du garçon essaye de convaincre Kitano d’utiliser ses talents. Kitano ne répondra pas, comme si ce type de talent artistique n’avait pas sa place dans le monde du showbiz, quand bien même ce talent toucherait au génie.

De même, l’ouverture de la séquence avec cet acte créatif spontané de la part de sa compagne. Se saisissant du ballon du garçon faisant du taishu engeki, un peu comme un passage de témoin, elle se met à effectuer un numéro de danse improvisé :

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M. Kitano contemplera la scène. Mais il ne contemplera pas le numéro des samouraïs, des sumos et autres membres du Nihon Sekigun. Il préfèrera leur faire la peau.

Bref le cinéma apparaît comme un art apportant la célébrité mais aussi comme une source d’affres et de questionnements douloureux pour un artiste pour qui la vie de clown autrefois était peut-être plus simple.

4) Sur ce que doit être une œuvre d’art

Plus le film progresse, plus le film part en vrille en terme de réalisme, avec une part toujours plus importante accordée aux rêves de M. Kitano. On peut voir celui-ci comme une victime de la machine du showbiz ou comme un raté qui ferait mieux de s’occuper des rayonnages de son convini. Reste que son cerveau est une éponge qui récupère les moindres de détails de son quotidien pour en faire des rêves fabuleux. Cela ne le rend pas plus heureux, plus riche, plus célèbre, non. Mais comparé à ce qu’est la vie de Beat Takeshi, et surtout à l’artificialité de ses films (thème qui sera repris dans Kantoku Banzai!), doit-il s’en plaindre ? Il y a ici l’idée que l’œuvre d’art ne peut être belle que si elle échappe le plus possible à ses conditions d’exécution. Dans l’écrin de la psyché de l’artiste, pas de problème, elle donnera lieu à des rêves sublimes. Mais dès qu’elle est tributaire des pesantes conditions matérielles d’un plateau de tournage, la magie semble instantanément rompue.

A la fin, M. Kitano, en voyant la dédicace que lui a faite Beat Takeshi (il a écrit « à Pierrot san » alors que le personnage lui avait demandé d’écrire « à Kitano san »), se saisit d’un couteau pour aller le tuer. On peut voir dans cet acte la volonté de se venger d’une multitude d’injustes vexations que le personnage a subie tout le long du film. Cette ultime moquerie étant la goutte d’eau.

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Autres moqueries : celles lancées par un voisin de pallier et sa femme. Là aussi, les quelques scènes où apparaît le couple ne sont pas sans opérer un clin d’oeil à la vie de cabaret de Kitano, avec les numéros de manzai.

Mais on peut aussi y voir autre chose. Par le trait ironique de Beat dans sa dédicace, par la dérision avec laquelle il semble prendre de haut l’artiste modeste takeshis 18(c’est-à-dire ce qu’il était autrefois) mais finalement authentique, pas encore corrompu par le système, par ce trait donc il provoque la colère de M. Kitano, le véritable artiste qui aimerait se débarrasser de cette baudruche sur-médiatisée qu’est Beat Takeshi. Et lorsque ce dernier se réveille sous les coups non pas d’un couteau mais de l’aiguille d’un acupuncteur, on comprend tout : M. Kitano n’était qu’un rêve, le rêve d’une expression artistique vraie car libérée de toute contrainte, de toute pression liée à l’argent.

Lors de la scène où on le voit répéter une scène pour un film rappelant Sonatine, l’acteur s’agace du fait qu’un projecteur est resté allumé après la prise et lui écrase le visage. L’étrange lumière crue paraît alors irréelle, pas vraiment naturelle pour une lumière supposée évoquer celle du soleil lors d’une scène se passant l’été :

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Plus tard, M. Kitano se rêve faisant des claquettes sur une voie ferrée lorsque arrive ce que l’on croit évidemment être un train. Là aussi, la lumière de ce dernier lui éclaire le visage :

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Mais il ne s’agit pas d’un train, c’est un homme rappelant le machiniste juché sur son échelle pour contrôler son éclairage :

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On songe à l’expression « être sous les feux de la rampe », situation que les personnages semblent peu goûter. Mais cette lumière en évoque aussi une autre. Lors de la scène du tournage, le raccord avec la précédente se fait ainsi :

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En évoquant la lune, le film aborde symboliquement la question du rêve et de l’imagination, aspects de la création que n’incarne plus Kitano mais figuré à travers la figure lunaire de M. Kitano/Pierrot. Les deux personnages ont leur monde artistique, mais les enchantements qu’ils procurent sont bien différents. M. Kitano arrive à créer de vraies étoiles par le biais d’un gunfight nocturne :

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Beat Takeshi, lui, subit les petites étoiles blanches sur fond bleu des décors informatisés :

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Et quand le projecteur lui écrase décidément bien trop la tronche, évoquant plus la lumière du soleil que celle de la lune, voici comment Kitano fait le raccord avec ce qui suit :

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La lune, astre de l’imagination, de la création mais aussi d’une certaine confidentialité. Le soleil, astre de la célebrité mais aussi d’une création morne et désincarnée. Beat Takeshi a l’argent et la célebrité, son avatar intérieur la création. Qui est le gagnant, qui est le perdant ?  La question n’allait pas finir d’être débattue intérieurement par le père Kitano, clown triste de plus en plus incertain sur la valeur de son art.

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Film expérimental, film introspectif, film autobiographique, film apportant une réflexion sur la création, tout concouurre à faire de Takeshis’ un film somme, la pierre angulaire de toute l’oeuvre de Kitano. On peut penser que cela fait un peu trop pour un seul film, que c’est un peu indigeste, il n’empêche : pour peu que l’on goûte ce genre de délire narratif, Takeshis’ est de ces films qui s’enrichissent sans cesse de nouveaux visionnages. Aventure à tenter sans aucun a priori.

8/10

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2 Commentaires

  1. L’analyse de film qui tue ! 🙂
    Je voulais le revoir pour continuer ma série des BO de Kitano sur Guts of Darkness, mais je n’ai pas eu le temps encore. Et ton article me donne encore plus envie de le revoir, mais mon DVD est dans un carton, ailleurs… bouh…
    J’avais aimé le film même si je pense en effet que comme le suivant, plus facile d’accès, plus déconneur, il est réservé aux Kitanophiles hardcore. La scène de conduite sur une route encombrée de cadavre m’a vraiment fait ressentir un truc Lynchien (mais bien loin de toute imitation, heureusement). Un film pas facile, pas très aimable. Et la BO vaut le détour, un drôle de mélange d’ambiant, de dub et même de passage électro-hip-hop produite par un duo de DJ sous le nom de NAGI (ouais, ça résonne pas pareil chez nous ce nom). Avec en plus les quelques chansons qui émaillent le film, dont celle de Miwa (dont j’ignorais évidemment qu’il fût l’amant de Mishima ! C’est un peu comme Amanda Lear avec Mick Jagger, non ?……..). D’ailleurs, ces chansons, ce sont plutôt du genre enka, c’est bien ça, non ?
    En tout cas super article, hyper fouillé. On voit le connaisseur. Et le film aurait bien besoin d’une réhabilitation critique, il avait été traité par dessus la jambe lors de sa sortie… (Outrage 2, même pas distribué… pfff)

    • En fait, depuis le début de cette série d’articles sur la ilmo de Kitano, Takeshis était un de ceux que j’avais le plus en ligne de mire tant j’étais pressé de le revoir. Le films est sûrement moins aimable au’Achille et la Tortue, plus consensuel, mais sans hésitation celui qui m’a le plus titillé les méninges avec une certaine excitation.
      Je n’ai pas parlé de la BO mais dans l’ensemble, elle tient la route. On n’a pas de thèmes marquant comme avec Hisaishi mais certains morceaux font leur petit effet. La scène de la plage en cela est plutôt réussie. Sinon oui, il y a bien de l’enka. L’info apparaissait au début de la rédaction de l’article, puis je l’ai effacée, je ne sais plus pourquoi. Il y a deux chansons de ce type : l’une interprétée par le vieux Miwa avec ses horribles cheveux jaunes (l’effet est moyen, c’est pour ça que j’y vois un personnage ambivalent, possiblement corrompu par le shobwiz), l’autre par un Miwa plus jeune renvoyant à ses glorieuses années de cabaret.

      Bien content de voir que je ne suis pas le seul à apprécier ce film. Mais c’est comme j’ai dit plus haut, une sorte de principe selon lequel après Hana bi (allez, Dolls) le cinéma de Kitano est devenu horrible. De la pure paresse, suffit de s’accrocher à Takeshis pour bien voir qu’il avait des choses à montrer. Bon, après, je vais peut-être moins faire le malin à la revoyure de Kantoku Banzai

      Sinon tiens ! regarde comment le père Mishima protégeait son amant (tournage de Black Lizard), ça rigolait pas !

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