Une affaire de famille, le retour

Les Bonnes Étoiles (aka Broker)

Hirokazu Kore-eda – 2022

Avec un titre français aussi cucul, je craignais le pire, mais finalement bonne surprise que ce film dont le titre original, Beurokeo, signifie « courtier ».

Deux hommes, Sang-hyeon et Dong-soo, sont des courtiers d’un type particuliers : ils détournent des bébés déposés dans une « boite à bébés » d’une église recueillant des enfants abandonnés afin de les revendre à des couples fortunés. Ainsi, il récupère un soir un adorable bébé joufflu déposé par sa jeune mère prostituée, So-young. Problème, prise de remords, la mère décide de récupérer son bébé. Enfin, pas complètement : faisant la connaissance des deux trafiquants, elle décide de les accompagner dans leur périple afin d’être sûre que son enfant sera vendu à un bon couple. Dans leur trajet, ils seront suivis par un duo de femmes flics cherchant à pincer les courtiers mais aussi par des hommes de main envoyés par la puissante belle-mère de la prostituée afin de récupérer l’enfant. Et un autre petit invité s’immiscera pour achever de reconstituer cette drôle de famille qui se demandera si, finalement, le mieux ne serait pas de garder le bébé et de continuer à vivre ensemble…

On peut voir ce film comme une sorte de décalque coréen d’Une Affaire de famille. Même type de sujet délicat (on passe de la famille recomposée pauvre et voleuse au vol d’enfants dans les orphelinats pour les vendre à des couples friqués), même prétexte à questionner l’idée de famille, questionnement qui fait comprendre que les liens de sang ne sont pas si importants. Une forme de redite donc mais qui, loin d’être gavante, enveloppe le spectateur de cette lumineuse tranquillité toute kore-edenne et lui fait suivre, peut-être pas avec jubilation, mais avec intérêt et bienveillance, ce road movie d’attachants bras cassés. Sur ce point, Song Kang-Ho sort du lot même si, franchement, les autres acteurs ont parfaitement été mis en valeur par la direction de Kore-eda. 

L’aspect rocambolesque de l’intrigue a pu faire dire à certains qu’il s’agissait d’un film mineur du réalisateur car maladroit dans son développement. Pour le coup, le titre français annonce bien la couleur : « les bonnes étoiles » supposent une sorte d’irrationnel, une conjonction d’éléments positifs qui peut paraître invraisemblable, horizon d’attente qui finalement ne prend pas au dépourvu quand l’intrigue policière se tisse de plus en plus à l’intrigue sociétale. J’ai trouvé pour ma part l’histoire plaisante, magnifiquement illustrée par de beau plans du pays du matin calme et une photographie travaillée permettant souvent des effets de sens.

Film mineur, donc non, je ne pense pas. Film majeur, non plus. Juste un film de Kore-eda, c’est-à-dire un film familial intelligent, vibrant de relations complexes dont on prend plaisir à assister au polissage par un intrigue renouant avec le mélo, une interprétation touchante et une mise en scène qui satisfera l’œil un minimum exigeant.

7/10

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