the Snow White Murder Case (Yoshihiro Nakamura – 2014)

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Miki Noriko, une magnifique jeune femme travaillant dans une entreprise de cosmétique, a été retrouvée morte, tuée d’une douzaine de coups de couteaux avant d’être brûlée vive. Un jeune reporter, Yuji, reçoit alors d’une amie qui se trouve aussi être une collègue de la victime une importante information : d’après elle, tout porte à croire que Miki a été tuée par Shirono, une autre collègue a priori instable et jalouse de ses succès. Le jeune reporter décide illico de mener l’enquête…

A priori rien de bien excitant dans ce Snow White Murder Case dont l’esthétique drama, avec ses couleurs, son montage, sa musique et le jeu de ses acteurs, avait de quoi rapidement me refroidir. Et puis, passée la demi-heure, je dois reconnaître que Nakamura a su rendre son propos intéressant en instillant à son récit une incertitude pirandélienne finalement assez plaisante. Car SWMC, c’est un peu une illustration du À chacun sa Vérité du dramaturge italien. A aucun moment Yuji ne met en doute le tuyau de son amie. Pour lui, Shirano est une piste intéressante qui peut lui apporter potentiellement un scoop qui le fera apprécier de ses supérieurs. Aucun doute non plus de la part des parents qui ne cherchent pas à défendre leur fille ou des collègues qui n’hésitent pas à balancer leur venin. Et évidemment aucune pitié à attendre des Twittos (auxquels Yuji se joint volontiers et assez imprudemment) qui réclament prison voire peine de mort pour Shirono. Comme pour parachever sa culpabilité, le film nous montre par deux fois le résultat journalistique du travail de Yuji. On assiste à son reportage pour la chaîne où il travail, séquence qui résonnera familièrement aux rétines de ceux qui sont habitués aux montages nippons télévisuels constitués de gros caractères, de voix dramatisant les révélations et de gros effets pour édifier le spectateur et instiller en lui des certitudes. Le tout accompagné des mines graves des invités sur le plateau qui ne peuvent que confirmer que oui, cette Shirono est décidément bien inquiétante.

Da la belle ouvrage journalistique, ouvrage qui va se voir à la fin de la première heure un peu malmenée par le courrier d’une spectatrice ulcérée par le portrait assassin que l’on a pu faire de son amie d’enfance. Elle la connait parfaitement et sait combien elle serait incapable de tuer quelqu’un. Durant une dizaine de minutes, les deux versions vont se combattre mais ce sera la plus nocive, la télévisuelle qui l’emportera. Dans une scène significative où l’on voit les parents de Shirono se prosterner devant le journaliste, on voit l’arrière-plan la grand-mère, alitée, qui affirme faiblement que l’assassin n’est sûrement pas Shirono. A nouveau la version antagoniste, autant dire que le témoignage de la grand-mère ne sera pas retenu au montage du reportage. Shirono, dans son costume de meurtrière jalouse jusqu’à la folie, est bien plus croustillante.

Évidemment le spectateur, lui, comprend bien que le regard sarcastique porté sur le travail journalistique sous-entend bien que ce n’est pas Shirono qui a tué. Scène amusante : dans son enquête Yuji croise le chemin d’une amie d’enfance de Shirono, amie devenue hikikomori. Un début de leçon, une mise en garde est alors donnée au jeune homme lorsqu’elle lui demande à la fin de son récit ce qui l’incitait à croire que ce qu’elle a dit est la vérité. Evidemment Yuji n’en tiendra pas compte et l’on se doute que c’est tout son beau château de cartes qui va bientôt s’écrouler.

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La deuxième partie du film s’ouvre sur une scène où l’on voit une Shirono malheureuse dans une chambre d’hôtel et qui s’apprête à faire le récit de son histoire avant, sans doute, de se suicider. Et là, on quitte le patchwork du journaleux, avec gros grain et montage faisant dans le sensationnel, pour le travail du cinéaste qui qui va se fondre avec la vie d’un de ses personnages. D’une focalisation externe qui se limitait à la surface des révélations débiles des collègues de Shirano, on passe à une perception interne qui ne nous cachera rien de ce qui a bien pu se passer entre ces O.L. Sans être non plus géniale, la deuxième partie se laisse quand même regarder et, dans ses bons moments, apprécier avec ce climat gentiment vénéneux empruntant énormément aux livres pour enfants ou aux contes de fées. Si l’on retient l’idée du Snow White du titre (dans le film le nom d’un modèle de savon), le parallèle avec l’histoire de Shirono est flagrant. Miki Noriko est moins Blanche Neige que la reine qui ne supporte pas qu’une autre soit plus belle qu’elle (motif décliné une deuxième fois avec une ancienne « camarade » de classe de Shirono). Pas vraiment de nains mais bien un prince charmant en la personne de Mamiya Tarazuka, violonneux bien coiffé pour lequel Shirono en pince. Citons aussi un empoisonnement et, au-delà de Blanche Neige, on retrouve le signal dans la nuit, le geste magique, ou encore la dichotomie entre beauté extérieure et pureté de l’âme. Film policier, drame psychologique aux allure de conte de fées, film satirique sur la perception déformée des médias et des réseaux sociaux (et du côté quart d’heure de célébrité » cher Warhol qui amène à se transformer face à la caméra et à mentir), the Snow White Murder Case a pour ambition d’épouser tout cela à la fois et parvient finalement à évacuer au fur et à mesure une impression de film brouillon et potentiellement insupportable avec ses incrustations au début de messages sur Twitter.  Assez joliment, le film se terminera d’ailleurs sur ces messages en incrustation, bribes de pensées qui ont réponse à tout et qui ont la force de leur certitude et de leur moralisme à deux balles. La bulle poétique douce-amère de Shirono était bien appréciable. Mais elle apparaît bien fragile face à une bêtise foncièrement médisante et qui apparaît aussi obsessionnelle qu’inarrêtable.

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7/10

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4 Commentaires

  1. Tout autre son de cloche pour moi… Je n’ai pas lu Kanae Minato, mais je pense que son univers n’est pas pour moi :

    http://www.bandofmovies.fr/forum/viewtopic.php?p=759872#p759872

    • « des téléfilms de luxe et certainement pas du cinéma »
      C’est ce que je me suis dit au début et finalement, le traitement très drama du film m’a paru intéressant par rapport à ces personnages mesquins, serrés dans une société avec peu d’esprit critique et abrutis par le martèlement des mass media. On sert au téléspectateur la merde qu’il a envie de voir… et au spectateur (qui a beau jeu de se moquer des goûts du précédent) le type de film qu’il est habitué de voir à la TV. Une certaine forme d’insolence finalement après, est-ce que c’est voulu ou non, c’est une autre histoire.

  2. Ça me botte bien, ton histoire…

    Je n’ai pas lu jusqu’à la fin, vu le spoiler que tu es…

    Question : il y a du nichon ou nada ?

    A.rnaud White Trash

  3. Le jour où l’on verra un semblant d’aréole ou de mamelon chez Nakamura n’est pas encore arrivé. Il est bien question à un moment du film de léchouille entre le 3ème et le 4ème orteil mais même cela s’avère pure manipulation médiatique.
    Mais ne t’en fais, de la créature de rêve bien pourvue, tu en auras la semaine prochaine. Et française encore !
    Olrik, roi du teasing frauduleux.

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