Un jeune un peu paumé, Tatsuhiko, décide de débarquer à Shinjuku pour y faire fortune. Il y rencontre rapidement Mako, un recruteur de scouts, ces hommes collants chargés dans les quartiers chauds genre Kabukicho d’alpaguer les jolies filles pour leur proposer des jobs allant de l’hôtesse à la prostituée en passant par l’actrice d’AV. Comme Mako semble avoir de la sympathie pour le blondinet et ses aptitudes de bagarreur, il l’engage et ce dernier ne tarde pas à montrer, malgré un style personnel, des dispositions pour le boulot. La situation se complique lorsqu’une bande rivale de recruteurs commence à avoir de sérieuses ambition sur Shinjuku, voire Tokyo dans son ensemble…
新宿スワン (Shinjuku Swan)
En attendant Whispering Star avec le retour à l’écran de la muse de Sono, et en attendant aussi que je me décide à voir Love & Peace qui décidément ne m’inspire pas confiance, je continue ma rétro 2015 des cinq films pondus par Sono durant cette année avec ce Shinjuku Swan qui, là aussi, m’incitait à une certaine prudence. A voir la bouille du blond décoloré sur l’affiche mais aussi la B-A nerveuse, on pouvait craindre craindre un Sion Sono que je n’aime pas, celui de Why don’t you play in Hell ? comprenez le Sono qui surfe sur la notoriété que lui a procuré Love Exposure en reprenant les thèmes et le dynamisme de ce film mais en le décuplant, livrant un film aussi vain qu’abrutissant.
Deux jeunes hystériques en train de courir bruyamment dans une rue. Avais-je vraiment envie de voir ce film ?
Eh bien, bonne surprise, il n’en est rien. Sans être non plus un chef-d’œuvre, Shinjuku Swan est loin d’être le nanar annoncé et se paye même le luxe d’être assez accrocheur pour suivre sans déplaisir cette histoire de près de deux heures et demie. Très loin de la boursouflure pailletée (mais parfois réjouissante) de Tokyo Tribe, Shinjuku Swan développe une intrigue en se concentrant sur ces deux clans de scouts dont l’un choisit la voie de la drogue pour étendre plus vite son pouvoir. C’est une restriction narrative bienfaisante qui permet de cerner efficacement les enjeux et d’éviter un trop plein de personnages et de fils narratifs alambiqués.
Les deux clans : les Burst (en haut, c’est celui auquel appartient Tatsuhiko) et les Harlem.
Autre (assez) bonne surprise : le personnage de Tatsuhiko joué par Gô Ayano est finalement supportable. Marqué durablement par la pitoyable prestation de l’atroce Hiroki Hasegawa dans Why don’t you play in Hell ? (raison pour laquelle je repousse le visionnage de Love & Peace puisqu’il en est le personnage principal), je craignais un jeu grimaçant et hystérique mais finalement, sans être non plus sobre, loin s’en faut, Ayano campe relativement bien son personnage et parvient même à le rendre attachant.
Dois-je le préciser ? Comme il n’aura échappé à personne que Sono, se rapprochant de la soixantaine, développe plus que jamais une cinégénique obsession pour les petits lots à gros seins, c’est tout naturellementque l’on retrouve une armada de bijins tombant dans les filets des scouts les plus cyniques..
La fréquence de ce type de plan dispose d’un ration fort agréable, pas de crainte à avoir de ce côté-là donc.
Forcément, ça ne fait pas de mal aux mirettes même si on a un peu de mal à saisir le propos de Sono, coincé entre une volonté de montrer une exploitation parfois brutale des jeunes femmes qui n’est pas sans rappeler certaines scènes de Guilty of romance, mais aussi une gente féminine parfaitement heureuse de son sort et même parfois volontaire, demandeuse de toujours plus de clients afin de se payer le sac Vuitton de ses rêves. Comme le film fait à un moment le lien avec Le Petit Prince de Saint Exupéry et les univers de contes de fées, cette indécision reste cependant pertinente. Noyé dans l’univers néonisé de Shinjuku, le théâtre où se déroule l’action apparaît comme un univers de fantasmes et de contradictions où insouciance consumériste et désespoir se côtoient. Tatsuhiko avec ses bons sentiments ne pourra tout régler. Aussi se contente-t-il d’être là, de gagner de l’argent en faisant son travail, d’être même apprécié par le jeunesse ambulante du quartier et, si le hasard lui fournit l’occasion, sans doute il n’hésitera pas à reprendre son armure de chevalier blanc pour venir en aide à une petite Cosette voulant sortir des griffes de son mac.
On songe ici à la franchise vidéo-ludique de Sega, Yakuza, franchise qui avait été adaptée il y a quelques années par Takeshi Miike. On a le même type de héros de mauvais garçon bagarreur prompt à s’émouvoir et à venir en aide aux paumés de cet immense terrain de jeu qu’est Shinjuku et qui offrira son lot de rencontres sexy et de trognes à malaxer avec les poings (la scène de baston dans le bowling m’a fortement fait penser au jeu). Pas besoin de chercher longtemps les quêtes, il suffit de marcher dans les principales artères et d’observer, les victimes des activités interlopes du quartier tomberont d’elles-mêmes sous son regard acéré (un scène amusante avec Tatsuhiko et Mako n’est d’ailleurs pas sans faire un amusant clin d’œil à Watson et Sherlock Holmes).
A la fois romantique et cynique, Shinjuku Swan s’avère donc être un film plutôt réussi et qui peut faire comprendre pourquoi Sono développe actuellement une suite, tant l’histoire et le quartier qu’elle utilise est un concentré de toutes ses thématiques : la nuit, les secrets de personnes en apparence respectables, la violence, le sexe et les filles fortement pulmonées. Mon unique réserve : un choix musical peu inspiré, très loin des morceaux de Yura Yura Teikoku ou des oeuvres appartenent au répertoir classique. Mais comme Why don’t you play in hell ? avait usé de cette veine en donnant l’impression de constituer une plate resucée de Love Exposure, ce n’est peut-être pas si mal.
6,5/10
J’espère que Sawajiri ne reviendra pas pour la suite, elle joue vraiment comme une savate et la romance culcul est le vrai poids mort du film.
La suite peut avoir un p’tit côté « Outrage » pas déplaisant… Les seconds rôles ont des bonnes trognes de gangsters.
Et parce qu’un homme averti en vaut deux, dis-toi que le cabotinage de Hiroki Hasegawa dans « Love & Peace », c’est du puissance 1000 comparé à sa prestation dans « Why Don’t You Play in Hell ».
Moui, Sawajiri est assez moyenne mais j’ai bien aimé comment sa poitrine rebondit lorsqu’elle court dans la rue avec son blondinet. Cependant pas de quoi me donner envie de la voir dans Helter Skelter.
Les seconds rôles sont effectivement assez plaisants, notamment Seki qu’il sera bon de revoir dans le deuxième volet.
Et je crois que c’est toi qui m’avait signalé la calamité Hasegawa dans Love & Peace. Je vais quand même le voir dans les jours à venir mais je sens que ça va me demander un minimum de préparation mentale.