Angoulême 2024 : shojo sophistiqué et katana sanglant !

Comme d’habitude à ce moment de l’année, le FIBD d’Angoulême a donné lieu à un petit périple d’une journée. L’année dernière, cela s’était fait le jeudi en solitaire, avec pour but de faire partie des élus ayant la possibilité d’avoir une dédicace de Junji Ito (je m’étais cassé les dents). Là, j’y suis allé le dimanche, l’esprit tranquille, en compagnie d’Olrik the 3rd et d’Olrik jr, redescendu de sa Prépa poitevine pour se distraire l’esprit.

Pour les dédicaces de Moto Hagio et de Hiroaki Samura, je savais que je pouvais m’assoir dessus. Elles avaient eu lieu le vendredi (je travaille) et le samedi (je fuis cette journée, trop de monde), et encore avec un système de tirage au sort pour obtenir un simple shikishi pré-imprimé avec une signature ! Point de dédicaces en vue donc, mais des achats et des expositions, ça oui.

Et un temps magnifique aussi. Doux, un beau ciel bleu du début à la fin, marcher pour se rendre d’un site à l’autre allait être fort plaisant. Comme d’habitude, nous sommes arrivés peu avant dix heures sur le parking du CNBDI, pour choper ensuite la navette qui nous mènerait dans le centre-ville. Objectif : faire d’emblée sa fête à l’expo Moto Hagio, dans le musée d’Histoire Naturelle.

Comme pour beaucoup, la mangaka a été pour moi une découverte. Je ne suis même pas sûr de pouvoir dire que je la connaissais vaguement de nom. Et pourtant, l’exposition nous la présente comme un nom important au sein de l’histoire du shojo manga, une précurseuse, une sorte de pointure à la Tezuka. Et après avoir passé trois bons quart d’heure à regarder de près toutes les planches originales exposés, je dois dire que je comprends l’aura que Hagio peut avoir dans son pays (je ne comptais pas les planches sidérantes de maîtrise et d’inventivité dans leur composition). Mais je comprends aussi pourquoi, contrairement à un Tezuka, elle a mis du temps à franchir les frontières. Actuellement plongé dans Le Clan des Poe, je vois bien que ça se lit autrement qu’un épisode de Black Jack. J’aime, mais il faut avouer que la lecture est moins aisée, plus exigeante. En tout cas, c’est une artiste qui en jette tout à fait dans une exposition (cela n’est pas toujours le cas, je me souviens ne pas avoir été plus que ça impressionné par l’exposition sur Taniguchi), et les trois Olrik ont bien savouré la découverte (d’autant que le dimanche matin à 10h30, on n’était pas les uns sur les autres, on pouvait zyeuter calmement).

Passage obligé à la boutique de l’expo. Comme j’avais dit à Olrik jr et Olrik the 3rd qu’ils pourraient dans la journée choisir un manga que je leur paierais, Olrik the 3rd jeta fort habilement son dévolu sur Barbara. Habilement car le bouquin n’était pas vraiment aligné sur les sept euros d’un shonen (20 boules en fait). Mais enfin, comme une promesse est une promesse, j’obtempérai avec ma carte bleue, en profitant par la même occasion pour me prendre le tome 1 du Clan des Poe.

Avant de quitter le musée, nous sommes allés rapidos voir au troisième étage l’expo sur Mattoti. Pour le coup, si l’expo Hagio avait évidemment toute sa place dans un festival de BD, je n’ai pas compris l’intérêt de cette expo. O.K., Mattoti a fait de la BD. Mais là, exposer ses toiles représentant des athlètes courir, WTF ? Le pire c’est qu’elle avait droit à son catalogue d’exposition alors que pour celle allouée à Samura, nada ! Un rien indifférents et consternés, nous avons traversé l’expo limte au pas de charge pour quitter le musée. Direction : la bulle de New-York, avec les éditeurs indépendants et les fanzines.

 

Ça avait l’air d’être une année sans pour le Lézard Noir. Quand je dis une « année sans » je veux dire une année sans mangaka ayant pris l’avion pour dédicacer sur leur stand (j’avais pu choper ainsi un beau dessin de Hisashi Eguchi). En revanche, toujours le bon plan chez Cornélius, avec leurs deux boîtes remplies de retours de libraire avec -50% (à cause de défauts  – parfois imperceptibles – sur la couverture). Là, j’ai un peu craqué :

Mon sac subitement rempli de plusieurs kilos, je ne crus pas utile d’aller jusqu’au bout de la bulle, là où se trouvaient les fanzines, d’autant qu’il commençait à faire faim.

Après avoir bouffé des hamburgers bien quelconques, nous mîmes cap sur l’espace Franquin où se tenait l’expo Samura. Mais en chemin, nous sommes tombés sur une nouvelle librairie que nous ne connaissions pas, la librairie Manga Kat. Il faut l’avouer, cette librairie envoie du bois. Disposant de deux étages, elle propose d’une solide sélection de mangas et est décorée d’une multitude de shikashis dédicacés.

On regardait sans forcément chercher à acheter puisqu’en milieu de journée on serait au Manga City mais à l’étage, stupeur ! Rintaro était en train de dédicacer son manga autobiographique, Ma vie en vingt-quatre images par seconde !

Était-ce un de ces coups de bol qui parfois me tombaient dessus au festival ? Allais-je finalement repartir avec la dédicace du monsieur qui avait, entre autres, animé Harlock ? Las, après avoir demandé à un employé de la librairie, je compris que ce serait impossible : il arrivait à la fin de son heure de dédicaces, d’autres attendaient, il avait un train à prendre. J’eusse dû peut-être insister, demander une modeste une signature qui ne prendrait pas de temps (c’est d’ailleurs ce qu’il faisait, le dessin qui apparaissait sur la double page étant en fait un dessin effectué avec un gros tampon), mais je laissai tomber.

À l’expo Samura (joliment intitulée « Corps et armes »), nous étions accueillis par ceci :

Oh ! me dis-je, il y a bien des imbéciles qui vont tiquer à la vue de la svastika bouddhiste. Les concepteurs de l’expo y ont pensé puisqu’à côté se trouvait un petit panneau explicatif soulignant l’absence totale de rapport entre svastika bouddhiste et croix gammée. Rappelons aussi que le personnage principal de l’Habitant de l’infini se nomme Manji, nom japonais de la svastika. Entrée originale en tout cas, et pertinente.

Et derrière les rideaux, comme prévu, une bonne claque. Dévoilant plus d’une centaine de planches et d’illustrations, l’expo nous fait vite comprendre que Samura est un sacré monstre du dessin. Alternant scènes sauvages avec un dessin tout en hachures et scènes contemplatives, sabres et chairs tendres se faisant pénétrer (je me suis souvenu de son épouvantable artbook, Brute Love, que j’avais chroniqué à l’époque Drink Cold), l’expo donne à voir sa palette technique et, pour le néophyte, donne furieusement envie de lire son manga (c’est le cas pour Olrik jr qui compte en commencer la lecture bientôt). Mention spéciale à la « salle écarlate » représentant les somptueuses illustrations couleurs et qui faisaient regretter l’absence d’un catalogue d’expo ou bien, à la boutique, d’un artbook. Il faut dire ici qu’un artbook a bien été édité au Japon mais qu’il est assez rare (et prohibitif) à trouver. Comme les éidtions d’artbooks en vf sont de moins en moins rares, peut-être qu’un jour…

Olrik the 3rd et Olrik jr y allant de leurs photos souvenirs.

Splendide expo en tout cas. La boutique était par contre plus décevante car trop concentrée sur L’Habitant de l’infini. Logique me direz-vous mais bon, ce n’était pas comme si d’autres mangas de Samura n’étaient pas publiés en France. Il n’y avait pas grand monde en tout cas, et j’en ai profité pour demander à l’aimable vendeuse de me faire cadeau de trois ex-libris en échange de l’achat du tome 3 de L’Habitant de l’infini (pour les avoir, il fallait acheter les trois tomes parus (carrément) or, comme j’avais déjà les deux premiers chez moi…). En voyant mon mâle visage duquel jaillit une voix irrésistible, la douce enfant accepta et je quittai l’espace Franquin fort satisfait.

Woopee !

Rien de neuf à la bulle du champ de Mars. Les gros éditeurs habituels : Casterman, Dargaud, Dupuis… Et toujours les petites armées d’enragés faisant la queue pour une dédicace. Nous n’y sommes pas restés longtemps. Direction le Manga City, que j’avais déjà découvert dans l’édition 2023.

Dans le grand hangar juste après l’entrée se trouvais un stand proposant les marchandises officielles du festival. Hop ! j’achetai le catalogue de l’expo Hagio ! A côté il y avait une boutique vendant des centaines de figurines manga. Après nous être bien donnés cet été à Miyazaki niveau achat de figurines (à des prix défiant toute concurrence, il faudra un jour que je ponde un article sur les expériences qui faillirent nous rendre dingues), on n’a passé guère de temps devant ces figurines bien prohibitives avec l’import.

Plus intéressante était la deuxième partie du Manga City, celle avec les éditeurs. On arrivait à la fin, c’était l’occasion de lâcher encore quelques euros, notamment pour Olrik jr qui n’avait pas encore choisi son manga gracieusement offert par son paternel. Il jeta son dévolu sur le stand Kana où nous accueilli une petite employée gironde suçotant goulument une chupa à la framboise. Après les ex-libris, autre coup de bol, bien plus intéressant celui-là : si on achetait deux tomes de Monster (Olrik jr étant intéressé par ce titre), on pouvait choisir un troisième manga offert gratis ! Si ça ce n’est pas avoir le sens de la relation client, qu’est-ce que c’est ? C’est aussi l’intérêt des fins de festivals où les vendeurs se permettent peut-être davantage de gestes commerciaux. En tout cas, ô armide inconnue à la chupa sucrée, sois remerciée ! Et sache que ton cadeau est entre de bonnes mains !

Après le Manga City, il n’y avait plus qu’à boucler la boucle en revenant au CNBDI. Aller voir l’expo Riad Satouf au vaisseau Moebius ? Bof. Un peu fatigués, et surtout voyant qu’Olrik jr avait la possibilité de prendre un train pour Poitiers, lui évitant d’attendre deux bonnes heures pour le suivant, on se contenta de la librairie du CNBDI où je parvins à me réfréner. J’en étais à 220€ d’achats, il était peut-être temps de se calmer. 

Il n’y avait plus qu’à déposer Olrik jr à la gare et à regagner mes pénates avec Olrik the 3rd, pour ma part avec la furieuse envie de commencer la lecture du tome 3 de L’Habitant de l’infini. Peut-être pas avec une chupa à la framboise dans le bec, mais avec à portée de main un verre d’excellent saké ainsi que mon iaito Musashi à l’époque où je pratiquais le iaido. Sensations garanties.

Lien pour marque-pages : Permaliens.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.