(The DC Archives) Toilet Hakase, un manga qui fleure bon la rose



Vieux proverbe chinois : celui qui s’endort en lisant Toilet Hakase se réveille avec le doigt qui pue. J’ai testé et je confirme : quoique pas chiant, ce manga est dangereux d’un point de vue olfactif. Mais pour ce qui est de la pédagogie et de l’éducation des lardons là, vous m’excuserez, ce chef d’oeuvre est aussi indispensable qu’un rouleau de Moltonel après une bonne colique…


 (article paru sur Drink Cold le 10 novembre 2010)

Plus rapide qu’une colique impromptue, plus teigneux qu’un balai à chiottes, plus corrosif qu’une plaquette de Desktop, plus résistant que du Moltonel, plus mordant qu’un sanibroyeur, j’ai l’immense plaisir de vous présenter aujourd’hui le seul, l’unique, le grand, le malodorant…

DOCTEUR CHIOTTES !

 

Oui, vous ne rêvez pas, vous voyez bien le logo JUMP COMICS. En soi, cela n’a finalement rien de bien surprenant, l’humour scato dans les mangas étant un grand classique. Pour ne citer que cet exemple, souvenez-vous du pet de l’immonde Bactérie sur la face de Kuririn. Reste que, tout de même, à la différence d’un Dragon Ball ou d’un Dr. Slump qui utilisent le filon de temps en temps, il faut savoir que cette série, qui traite de merde donc (à ne surtout pas confondre avec une série de merde), a été publiée de 1970 à 1977 et déclinée…

En 30 volumes ! (un record, avant d’être battu par Kochira Katsushika-ku Kameari Kōen mae Hashutsujo)

Vous me direz, pour une série qui parle d’excréments, il est logique qu’il y en ait une chiée. Sans doute. Mais quand on y réfléchit… 30 volumes !… soit 200 pages par volume… 200 X 30 cela nous fait… grosso merdo… 6000 planches, 6000 putains de planches fécalisantes ! Tout cela était-il vraiment bien raisonnable ? Laissons ici le docteur Chiottes répondre :

Oui, complètement ! Il fallait bien cela pour l’éducation de ces petits !

En effet, qu’on se le dise, derrière ses apparences bassement scato,Toilet Hakase (de Torii Kazuyoshi au fait), est une œuvre hautement éducative. Cette série est, au même titre qu’un certain manga d’Hiroshi Harata, une de ces œuvres que les pères de famille d’aujourd’hui sont fiers d’avoir lues dans leur jeunesse. Grâce à elles ils sont devenus des hommes emplis de ces valeurs qui font aujourd’hui du Japanisthan une des plus glorieuses nations de notre monde.  Mais regardez plutôt, vous allez comprendre :

Si avec ça Ségolène n’est pas convaincue de l’utilité des mangas…

Eh oui, depuis l’épisode du torche-cul dans Gargantua, on sait combien l’étude du caca peut être synonyme d’apprentissage de la vie. Il n’en va pas autrement dans Toilet Hakase qui dispense de petites leçons philosophiques à coups de séances d’observation de caca boudin sous les yeux hilares et émerveillés de ses jeunes lecteurs. Je vous le dis franchement : j’aurais aimé être un jeune Japanisthanais à cette époque rien que pour le plaisir de lire les aventures du docteur Chiottes. En France, il ne fallait hélas pas trop y compter. Vous imaginez, vous, la Castafiore, Tif et Tondu, le Scrameustache ou même Yoko Tsuno en train de couler un bronze ? Non, pas vraiment hein ?

Encore que, pour cette dernière…

Bon, pour Blake et Mortimer le cas est différent car là, pour le coup, c’est plutôt eux qui ont eu tendance à me faire chier, foi d’Olrik ! Mais cela mis à part, je n’ai aucun souvenir d’une bd franco-belge pour la jeunesse jouant la carte du pipi caca.

Mais alors, pourquoi ce topos quasi obsessionnel de la merde est-il permis au Japanisthan ? Pourquoi cela passe-t-il comme la main d’un chikan dans la culotte d’une OL aux heures de pointe, alors que chez nous ce serait le tollé assuré (souvenez-vous des Crados d’Art Spiegelmann) ? Tout d’abord, il y aurait comme un « moyen réconfortant d’extérioriser les problèmes de l’inconscient masculin nippon » (Jean-Marie Bouissou), à lier avec un père souvent absent durant l’après-guerre et une mère surprotectrice. En gros, un beau bordel entre le complexe d’Oedipe et un stade anal qui a du mal à tourner la page. Mais comme pour beaucoup de choses au Japanisthan, la raison peut aussi être à chercher du côté du shintoïsme où la notion de fertilité, prépondérante, a toujours vu d’un bon œil le meilleur engrais qui soit : le popo humain. Pensez, aller déféquer sur ses azalées ou ses patates n’a jamais fait peur au cultivateur japonais, même en plein hiver ! La merde est notre amie, elle est naturelle, bonne, fertile et drôle. En un mot :

LA MERDE EST LE BIEN

C’est ce que n’a de cesse de rappeler Toilet Hakase, manga pas chiant pour deux sous. Et bien dessiné avec ça : souplesse, élégance, précision et économie du trait, on sent que le mancaka n’avait pas de la merde dans les yeux. L’humour ? les mauvaises langues auraient tort ici de dire qu’il caresse  honteusement les gosses dans le sens du poil. L’humour glacé et sophistiqué y est en effet de rigueur, jugez plutôt  :

Subtil, non ?

Apprécions aussi le côté Tex Avery avec cet humour défiant les lois de la nature et jouant avec les caractéristiques graphiques de la bande dessinée :

 

Autre gimmick qu’un Akira Toriyama utilisera plus tard dans Dr. Slump, l’utilisation soudaine d’un graphisme réaliste :

La série fut sponsorisée un moment par une crème hémorroïdale.

Enfin, des gags conceptuels plutôt audacieux pour des gamins. Le mangaka devait sérieusement boire frais :

 

Et ce n’est pas fini ! Cerise sur le gâteau : pour les parents, le manga y va même de son conseil éducatif, du type de ceux qu’apprécierait sûrement Takeshi Kitano :

Comment faire avec les lardons qui continuent de se faire dessus ? Ne les lavez pas, suspendez-les avec le linge sale, ça finira bien par leur passer.

Bref, vous aurez compris que Toilet Hakase est un manga totalement indispensable à l’éducation des enfants, et Glénat serait bien inspiré de l’intégrer dans sa collection Kids (au lieu de publier des machins comme Chi).

En revanche attention ! Un peu comme avec le kancho, ce manga est à manipuler avec précaution. Et là, je ne peux faire autrement que de lancer la rubrique…

DC

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JEUX !

 

Les deux situations qui vont suivre présentent des situations authentiques (j’insiste, 100% authentiques) dans lesquelles les protagonistes ont manifestement des problèmes avec leur merde. Pour chacune d’elle, dites si la lecture de Toilet Hakuse est conseillée ou nonVous êtes prêts ? Voici la première situation :

1) Vu sur un forum :

bonjour a tous 
Voila j’ai 24 ans et ca va faire 2 ans que je prend des crises d angoisses des que je dois sortir , j ai peur d avoir envie d aller aux toilettes et de me « faire dessus » suite a ca je me suis coupé de l exterieur en restant enfermé j ai moi ce qui a fait que j ai perdu mon boulot mon copain et grand nombre d amis qui ne comprennais pas pourquoi je refusé toujours leurs invitations . depuis peu j ai l impression que ca s aggrave ce matin par exemple j avais un entretien telephonique et j ai eu une crise avant . Je ne sais plus quoi faire j avais commencé a aller voir un psy mais ca n a pas du tout collé avec lui donc j ai aretté et je cherche une solution pour me sortir de ce probleme qui m en cause bien d autre pour l instant je suis au chomage mais ca va pas durer je me demande comment je vais faire pour me maitrisser quand je vais devoir aller a un entretien d embauche ou alors quand je vais aller visiter un appart . Si qq est dans le meme cas et qu il a reussi a s en sortir je serai heureux d en parler avec lui . merci d avance a tous ceux qui prendrons le temps de lire ce message 3615 ma vie ^^ . Céline

Alors ? Pas d’avis ? Allons, poussez que diable ! Non, toujours pas ? Bon, voici le deuxième cas, peut-être que ça viendra :

2) Fait divers survenu le 3 août à Settsu, une ville dortoir de la région d’Osaka :

Tatsuya Moriguchi, 39 ans, stressé par son travail, a été arrêté par la police japonaise pour avoir jeté ses excréments sur deux passantes en roulant en moto. Le 3 août, l’homme, après avoir faits ses excréments en plein air, a enfourché sa moto tenant le guidon de la main droite et ses excréments de la main gauche. Arrivant à la hauteur de la jeune femme, le motard l’a bombardé.

« Le suspect a expliqué avoir fait ça car il se sentait stressé au travail », a expliqué le porte-parole de la police.

« Je n’ai aucune idée du type de peine dont il pourrait écoper », a reconnu le porte-parole, confiant n’avoir « jamais entendu parler d’un cas comme celui-là auparavant ».

Tatsuya Moriguchi a préféré se rendre à la police car pour lui, il n’aurait pas pu échapper à la police plus longtemps.

 

Pas simple hein ? C’est de votre faute aussi bande de crêpes, vous auriez bossé un peu plus à l’école primaire, ce jeu ne serait qu’une formalité. Allez, écrivez vos propositions sur un bout de papier, je ramasse. Passons maintenant aux soluces :

Soluce du n°1 :

Réponse du Dr. Olrik, proctologue de la buvette Drink Cold :

Ma petite Céline,

Tous les symptômes que tu évoques sont la manifestation d’une apopathophobie carabinée, comprends la peur d’aller faire la grosse commission. Dans ton cas, je n’hésite pas et te prescris la collection complète de Docteur Chiottes. Je te conseille de placer les trente tomes dans toutes les toilettes susceptibles d’accueillir ton gros derrière (tes toilettes, celles de tes parents, de ton boulot, etc.). Dès que tu sens que les intestins te travaillent (et donc, par la même occasion, que sourd une désagréable angoisse), rends-toi au bidet, là ou tu sais qu’un exemplaire de Toilet Hakuse t’attend. La drôlerie des situations de détendera, t’aidera à relâcher le sphincter et à étouffer tout sentiment d’oppression. Au fil du temps, tu n’associeras plus mentalement le fait d’aller à la selle à quelque chose d’angoissant mais au contraire à une activité bidonnante. À tel point d’ailleurs que tu t’apercevras sûrement qu’il peut être bon de rester une heure dans les toilettes à lire un vieux manga (moi en tout cas j’aime). N’oublie pas de t’essuyer à la fin et d’aller te laver les pognes.

Bien à toi,

Docteur Olrik

PS : pour le cas où il s’avérerait (mais j’en doute) que ma prescription ne fonctionne pas, il y a toujours l’utilisation du kancho, matin, midi et soir avant les repas. Demande à tes proches de t’aider.

 

Soluce du n°2 :

Il y avait un piège ! Car dans le cas de ce Moriguchisonbronzenpleinair, le mal était déjà fait ! Stress au travail ? Et mon cul, c’est du yakitori ? Flairant l’excuse nauséabonde, j’ai déféqu… dépêché nos deux reporters de choc, Sébastien et Mamadou…

Et fissa bande de larves !

… ces deux têtes chercheuses spécialisées dans l’exploration cloaqueuse du Japanisthan, afin de nous mettre au parfum sur la véritable raison qui a poussé cet ouvrier à confondre OL et lunettes de gogues. Et devinez quoi? Cet homme était un inconditionnel de cette série ! Se faisant passer pour des policiers, nos deux reporters ont en effet retrouvé dans son appartement les 30 tomes (tous dédicacés par l’auteur) de la série, 25 figurines à l’effigie des personnages et une peluche trouvée dans son lit :

 

Et il y a pire : en explorant certains forums japanisthanais, Seb et Mamadou découvrirent que l’homme projetait de se rendre à Harajuku, déguisé en Docteur Chiottes et armé de deux sacs remplis de ses excréments pour agresser les passants. Un peu plus et l’on avait droit à de nouveaux reportages bien médiocres sur France 2 susceptibles d’énerver Megane (pas bon pour son cœur), on l’a échappé belle – non, pas de jeu de mots dispensable avec « caca nerveux », je me sens un peu vidé là.

Bref, vous aurez compris que dans ce cas, conseiller ou non la lecture de Toilet Hakase n’a aucune espèce d’importance, le type est bon pour l’asile, ou pour aller boire frais à la buvette.

C’est ça, bonne idée ! Tous à la buvette !

 

Lien pour marque-pages : Permaliens.

4 Commentaires

  1. J’avoue lors de mon dernier voyage au Japanisthan avoir essayé de mettre la main sur un vieux jump comics de Dr Hakase. En vain, et c’est pourtant pas faute d’avoir inspecté de fond en comble les book-off de Miyazaki. Mais grâce à ta récente info, je sais dorénavant qu’une belle intégrale m’attend pour mon prochain voyage. Entre mes Lone Wolf and Cub et mes kamui-Den, ce sera du plus bel effet !

  2. En fouillant bien dans un book-off, tu pourras trouver aussi un truc du nom de ひっとらぁ伯父さん signé par un du duo responsable de Doraemon (Fujiko FujioⒶ), à base d’Hitler rigolo et de canard laqué de Nankin.

  3. Après un coup d’œil sur Google image, inutile de dire que j’ai aussitôt noté le titre sur mon calepin. Merci pour le tuyau l’ami !

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