Mardock Scramble (Susumu Kudo – 2010/2012)

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Rune Balot est une jeune prostituée qui a le malheur de tomber une nuit sur un richissime tueur en série, Shell. Enfermée puis brûlée vive dans une voiture, elle se voit cependant ramenée à la vie par le docteur Easter. Devenue une cyborg, elle est déterminée à se venger de son meurtrier notamment grâce à l’aide d’Oeufcoque, arme ultime polymorphe ayant l’apparence d’une souris.

Toujours risqué de se lancer dans des anime cyberpunk après la monstrueuse franchise Ghost in the Shell, véritable maître étalon du genre. Mais après en avoir fini avec les trois films de 70 minutes qui composent Mardock Scramble, force est de constater que le jeu en valait la chandelle. Difficile encore de déterminer s’il s’agit d’un chef d’œuvre du genre mais une œuvre qui sait habilement tirer son épingle et paraître suffisamment belle, originale et profonde pour s’enquiller sans souci les trois épisodes, ça oui.

Il y a d’abord cette réalisation sans faille qui en met plein les mirettes. Evidemment pas un gage de réussite mais c’est toujours bon à prendre lorsque l’on met en scène un univers high-tech ambitieux fait de laboratoires aseptisés, de ruelles obscures ou de quartiers néonisés style Dotonbori. Les différents lieux propres au genre sont admirablement retranscrits et c’est un plaisir de voir les personnages s’y mouvoir avec fluidité.

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Après, il y a l’écueil des personnages archi stéréotypés. Entre les cyborgs pas très expressifs et les détectives hard boiled, on peut très vite se trouver face à un univers ronronnant donnant une forte impression de déjà-vu. Ici, c’est le point fort de Mardock Scramble. Les affres du personnage de Rune font penser au questionnement intérieur de Matoko Kusanagi dans Ghost in the Shell mais sur un mode tout de même plus inquiet, un brin douloureux, et donnant parfois à voir un certain lyrisme, comme lorsque de cet étonnant passage situé dans le « paradis » (centre médical de très haute technologie où de véritable miracle peuvent être accomplis) durant lequel une discussion avec un cyborg dauphin (!) va l’aider à comprendre les problématiques de son ego et de sa destinée.

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L’autre étonnant personnage est Oeufcoque. Lui et Runetomberont mutuellement amoureux sans que le spectateur trouve cela ridicule. L’incarnation par les voix des doubleurs, l’élégance de la réalisation, tout cela concourra à donner de l’épaisseur au couple et à rendre crédible cette idylle dans un univers totalement barré. Précisons ici que les motifs propres au cyberpunk (technologie cybernétique, l’informatique, la violence, le cul bref, un univers foncièrement adulte), c’est du puissance 10 par rapport à Ghost in the Shell.

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Coucou les amis !

Avec le risque de tomber dans l’excès et le ridicule mais là aussi, la pilule passe assez bien avec même un goût de reviens-y. Et avec même l’impression d’assister à un étrange décalage par rapport au genre d’origine. Comme si cet univers cyberpunk, avec son exubérance colorée, son imagination débridée, ses créatures horrifiques, finissait par se doubler d’un autre, bien connu et renvoyant à l’enfance : le conte de fées. Il y a un peu de cela dans MS, notamment avec son trio de personnages principaux. Le docteur Easter, c’est évidemment maître Gepetto, la souris Oeufcoque, bonne conscience de Rune qui est là pour la mettre sur la bonne voie (elle connaîtra cependant le mal dès la fin du premier épisode), c’est Jiminy Cricket et Rune la poupée brisée, c’est Pinocchio, l’héroïne qui va devoir jouer au jeu de la vérité, s’efforcer de ne pas mentir lors du procès qui va la mener à affronter et peut-être vaincre Shell. Une fois que l’on a en tête ce schéma, difficile par la suite de s’empêcher de voir une multitude de référence à l’œuvre de Collodi ou à la version de Disney. Le complexe gigantesque du Paradis peut évoquer le ventre de la baleine, le casino de Shell (excellente séquence au passage) à l’île des enfants, étape décisive à l’apprentissage de Rune / Pinocchio, etc. Il y a sans doute de la surinterprétation à cela mais par son absence totale de retenue dans le traitement des motifs propres au genre, MS finit par donner un effet de miroitement de symboles permettant de quitter le réalisme pour le mythique propre au conte. Dire que l’on tient un concurrent sérieux à Ghost in the Shell est peut-être excessif. Mais une alternative intéressante à ceux que le côté « hard-science » de l’oeuvre matricielle rebuterait, on peut l’avancer sans réserves.

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