Bijins de la semaine (23) : les femmes de Michetz

Ma nouvelle série sur les Japonais dans la BD franco belge m’inspire et inévitablement, m’amène à consacrer le  23ème numéro de mes « Bijins de la semaine » à… un dessinateur français.

J’ai toujours envié ceux qui ont connu l’âge d’or du journal Spirou, celui où l’on pouvait suivre semaine après semaine la dernière aventure de Spirou dessinée par Franquin, les planches de Gaston et les délires du Trombone Illustré. Mais d’un autre côté, il y a indéniablement eu des choses intéressantes dans les 80’s, avec des séries plus adultes. Kogaratsu de Marc Michetz est de celles-là.
Sans trop entrer dans les détails car Kogaratsu fera l’objet d’un article à part entière, disons juste que c’est la meilleure bande dessinée de samouraï dessinée par un auteur non japonais. Je prends quelques risques en écrivant ceci, et pourtant, difficile de ne pas être admiratif devant les excellentes histoires de Bosse et, surtout, du dessin sobre et percutant de Michetz.

Quand la série est parue dans Spirou, je me souviens que le jeune lecteur que j’étais s’était senti désemparé devant ce trait qui rompait si brutalement avec l’école dite de Marcinelle (en opposition à l’école de Bruxelles, celle du journal Tintin). Je sentais que le travail était de qualité, mais je ne pouvais pas dire que j’aimais ces fentes au milieu du visage en guise d’yeux, ces faces plates, ces mentons tombants et ces nez arqués. Des visages asiatiques, oui, mais des visages grimaçants, un peu difformes, presque laids.

Bien des années après, je n’ai plus aucune réserve devant ces personnages. Hommes ou femmes, ils respirent le Japon. On y retrouve le hiératisme des films des samouraïs mais aussi la même palette d’expressions que les personnages de ces films arborent lorsqu’ils mettent de côté leur contenance : amour, colère, haine, folie ; si Kogaratsu baigne parfois dans une ambiance emprunte de zen, de bouddhisme et de shintoïsme, la tonalité guerrière n’est jamais très loin.

De beaux visages de Japonais donc. Et de belles Japonaises, qu’elles soient d’ailleurs dans Kogaratsu, Tako (one shot de Michetz) ou dans de nombreux exlibris. Femmes à la fois sexys, délicates mais extrêmement dures. En effet, les potiches n’existent pas dans l’univers de Michetz et derrière la frêle et timide demoiselle de cour peut se cacher une redoutable prédatrice qui n’hésitera pas trancher la gorge de son amant samouraï dans son sommeil.

Pas de grosses poitrines, juste des visages et des corps oeuvres d’art (la simplicité de certains visages ne sont d’ailleurs pas sans tendre vers l’estampe). À leurs homologues masculins la gloire des champs de bataille, à elles les intrigues de cour que leur permettra de vaincre une beauté aussi lisse et dangereuse que le plus affuté des katanas. Bijins vénéneuses que les bijins de Michetz…

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10 Commentaires

  1. mmmh, j’avais aimé Tako, Kogaratsu, je connais moins bien, mais ça va pas durer.

    Au fait, les ex libris très chaud là, ils sont inspirés d’une bd ou c’est juste un délire pour nous faire saliver ? J’en bave

  2. Non, à part le 2ème (Tako), le 3ème (Kogaratsu) et peut-être le dernier (le samouraï ressemble à Kogaratsu), tous les autres sont le fruit de l’imagination de Michetz, indépendamment de toute série.

    Dans mes souvenirs, j’ai surtout aimé Kogaratsu après les premiers albums, quand le dessin de Michetz prend son envol et les scénarios de Boss s’allègent. Mais faudrait que je relise tout ça. Par contre, je ne sais pas du tout ce que valent les derniers albums.

  3. C’est bien dommage que ces exlibris ne soient pas des séries, Tako joue bien du fantasme, et ça marche plutôt bien.
    Pour Kogaratsu, je n’ai lu que Le Pont de nulle part et L’Autre moitié du ciel. Le dessin est magnifique, mais je suis un peu resté sur ma faim niveau scénario. Je crois qu’il existe une intégrale d’ailleurs.

  4. Il existe en effet une intégrale… mais incomplète, seul le tome 1 est paru.
    http://www.dupuis.com/catalogue/FR/al/9918/kogaratsu_-_l_integrale_-_tome_1.html

    Le Pont de nulle part
    est l’album n°0 et est constitué de plusieurs histoires courtes centrées sur l’apprentissage de Kogaratsu. Celui-ci est un personnage non dénué de défauts, et c’est ce qui le rend sympathique. J’avais bien aimé cet album. On y trouve par ailleurs la fille espiègle du 3ème exlibris.

    Dans mon souvenir, le « meilleur » album (parmi ceux que j’ai lus) est le Printemps écartelé. Il vient superbement achever l’histoire commencée par les deux albums précédents (enfin non, le dos du tigre est la véritable conclusion si je me souviens bien). L’histoire se passe dans un Hokkaido enneigé et possède une remarquable scène de seppuku. Je te prie de croire que mes yeux de gamin ont bien halluciné lorsqu’il l’ont découverte dans Spirou !

    Par contre, je n’ai pas lu l’autre moitié du ciel.

  5. Kogaratsu c’est le bien.
    Je n’ai jamais été fan de la façon qu’a Michetz de faire les yeux, mais je suis un addict absolu de ses drapés, ses postures, sa mise en page, sa mise en scene meme. Et il dessine admirablement les corps, jamais trop parfaits, humains. Ce mec a tout compris au jidai geki, à la dramaturgie et a un sacré bagage culturel concernant le Japon.

  6. Oui, ce mec est un dingue du Japon, je crois d’ailleurs qu’il y vit. Une sorte de précurseur finalement, à une époque où l’intérêt pour le Japon était le fait de quelques happy few.

    Une curiosité : dans Spirou il y a eu durant plusieurs années une série humoristique intitulée « le Gang Mazda ». Dessinée par Darasse, elle mettait en scène trois dessinateurs du journal de Spirou cohabitant dans le même studio. Il s’agissait de Darasse, d’Yslaire (Bidouille et Violette, Sambre) et… de Michetz, représenté comme étant une boule de muscle violente, colérique et respirant Japon. Assez anecdotique mais amusant, sans plus.
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    C’est vrai sinon que ses yeux sont très particuliers. Et pourtant, lorsqu’on les regarde attentivement, y’a pas, il a le truc pour chopper un certain type d’yeux japonais, notamment la paupière supérieure, souvent proéminente. C’est peut-être ce qui peut dérouter.

  7. elles ont le popotin peut-être un peu trop rebondi pour des japonaises, mais on va pas lui reprocher.

  8. En revanche, certaines paires de gambettes sont bien vues : un peu mal fichues, mal proportionnées (étonnant exlibris n°4), arquées (n°6) : pas de doute, on est bien devant des japonaises.

  9. Pour moi le meilleur reste « le stratégies des phalènes »: l’idéal samourai… magnifique par le dessin mais aussi par les couleurs, l’ambiance.. je le relis souvent!

    • Pour ma part je reste marqué par les deux planches de seppuku dans le Printemps écartelé. Du coup cet album est pour moi le titre emblématique de la série.

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