Harajuku est le quartier de Tokyo bien connu pour ses modes vestimentaires exubérantes. S’y rendre un dimanche après-midi est un des trucs à faire au moins une fois lorsque l’on se rend à la capitale. Ce moment de la semaine est en effet celui où des hordes de jeunes gens fagottés dans des styles indescriptibles (il faudrait que j’y consacre un article entier avec moult exemples) se rassemblent sur le fameux pont menant au parc Yoyogi. Citons aussi la Takeshita street (竹下通り), petite rue très fréquentée et saturée de magasins de fringues.
On le devine, ces jeunes gens, en s’habillant ainsi (allez, je donne tout de même un exemple) :

… donnent évidemment l’impression de vouloir délibérément les regards et les objectifs des appareils photo. De fait, ils se prêtent de bonne grâce à ce petit jeu. Je n’ai pas souvenir d’avoir essuyé un regard courroucé durant un mitraillage (le mot n’est pas trop fort tant on a l’impression, avec ce quartier, de ne pas savoir où donner de l’objectif).
Mais cet art d’être regardé ne se limite pas à ces extrêmes vestimentaires. Ainsi les deux jeunes filles de la photo tout en haut. Elles sont habillées normalement mais, Harajuku oblige, vas-y que je me rends intéressante aux regards de passage. En fait, j’aurais pu tout aussi bien intituler ce passage « l’art d’attendre en étant regardé ». Attendre quelqu’un est toujours ennuyeux, on a l’impression de traverser un moment vide, qui ne sert à rien. Alors autant attendre en se donnant des airs d’héroïne de doramas (« dramas », les feuilletons japonais) ou en trouvant une attitude cool, on attirera les regards et on se sentira exister. Un peu ridicule, sans doute, mais intéressant pour le photographe (et non, en écrivant cela je ne pense pas nécessairement au postérieur de la demoiselle de gauche).