Les Pieds Nickelés du désoeuvrement

Bonne surprise que ce Wakamusha, de Ryûtarô Ninomiya dont le Minori, on the Brink ne m’avait pourtant pas laissé un grand souvenir.

D’abord à cause de sa forme, constituée d’une succession de vignettes fixes au format 4:3. Très soignées dans leur composition, de longueurs inégales (comptez au moins dix secondes pour un plan), elles donnent au film un rythme particulier, à la fois contemplatif et nerveux, surtout quand Eiji le moulin à paroles entre en scène.

Mais il y a aussi le fond. De mémoire, Minori, on the Brink mettait en scène une jeune femme désabusée, réagissant parfois impulsivement devant certains fâcheux croisés dans son quotidien. Il y a cet aspect chez les trois gars de Wakamusha. L’un (Hekichi) vit chez sa mère et bosse dans une maison de retraite. L’autre (Wataru) est serveur dans un modeste resto et prend un malin plaisir à saouler les autres de paroles et à y aller de provocations avec des quidams rencontrés dans la rue. Enfin le dernier, Wataru, sombre dans un mélange de rage et de dépression, en voulant particulièrement à son père d’exister. Autant le dire, les trois ne sont pas spécialement sympathiques, mais évoluant dans cette forme particulière, dans une ville qui semble quasiment déserte et silencieuse (aucune musique n’accompagne leur quotidien), il est difficile de ne pas s’intéresser à leurs personnalités, surtout à celle de Wataru, la plus mystérieuse et qui m’a rappelé… le serial killer dans Cure, de Kurosawa. Ce n’est pas non plus qu’il dispose d’un pouvoir surnaturel, mais quand même, il y a chez lui comme une force tragique qui influence son entourage en révélant une facette pas toujours heureuse, presque incontrôlable.

Du coup on se demande comment va se terminer cette histoire. Les bouffonneries d’Eiji font sourire, mais quand la situation s’envenime entre lui et Wataru, et que ce dernier se met à dos pas mal de monde, on sent poindre le drame. Habilement, Ninomiya laissera le spectateur se débrouiller avec une fin pour laquelle il devra terminer si elle est explicite ou purement symbolique.

Une ballade d’1H43 très particulière dans sa manière d’illustrer différents types de crises existentielles. De quoi me donner envie de tenter prochainement Dreaming In Between, du même Nanomiya et réalisé l’année précédente.

7/10

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