Brouillard nostalgique

Beyond the fog (Kiri no fuchi)
Daichi Murase (2023)

Pour combattre la vague de chaleur, rien de mieux que de se mater un petit film art house se passant dans la fraîcheur printanière d’un petit village de la préfecture de Nara.

Dans Beyond the fog, on suit le quotidien d’une famille de trois personnes. La mère, Saki (Asami Mizukawa), se bat après son divorce pour maintenir la gestion du ryokan familial. Elle est aidée en cela par son père Shige (Shinzo Hotta), tandis que sa fille Ihika (Shuri Miyake) tue le temps à se promener, le visage comme indifférent à tout. Elle semble malgré tout avoir un attachement particulier à son grand-père, même si ce dernier commence à montrer des signes de sénilité. Or justement, un jour, il disparaît, laissant sa fille dans l’embarras pour continuer à gérer l’auberge.

Autant le dire tout de suite : il ne se passe pas grand-chose dans Beyond the fog. Deuxième long métrage de Daichi Murase, le film évoque immédiatement les films de Naomi Kawase, ceux chantant un Japon traditionnel et contemplatif, loin du Japon urbain. Bénéficiant du travail de Takeshi Dodo à la photographie, Murase propose une plongée dans l’univers d’Ihika souvent somptueuse pour les yeux. Pas qu’un simple catalogue de belles images d’ailleurs : la jeune fille semble avoir des antennes pour apprécier cette beauté et sentir ce qu’avait pu être autrefois le village, quand il était davantage habité et que le cinéma local était capable de diffuser des films (c’est maintenant une vieille bâtisse en ruines).

Au-delà de chanter un Japon rural où le temps semble s’arrêter, c’est donc aussi la nostalgie d’un monde où des lieux de vie populaires existaient au sein de cette nature, lieux dont le grand-père a été le témoin. Une fois le personnage disparu, ces lieux n’ont-ils plus qu’à disparaître, à être oubliés définitivement ? Pas nécessairement. Tant qu’il y aura des jeunes avec ces antennes (jolie scène avec Ihika à la fin du film) ou d’autres avec assez de curiosité pour s’intéresser à des lieux perdus (trois étudiants font un séjour à l’auberge pour enquêter sur l’histoire du village), l’âme de ces lieux, pour fragile qu’elle soit, pourra perdurer, davantage spirituellement que concrètement.

Un film intéressant, qui donne envie de se pencher sur le premier film de Murase (Roll) et de suivre les suivants, si d’aventure il réalisait d’autres films plutôt que de disparaître subitement dans la nature comme son personnage de grand-père.

7/10

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