Apprendre le japonais… un vieux serpent de mer en ce qui me concerne, serpent qui tend à prouver que l’immersion passive, au niveau des résultats, ben ce n’est pas exactement ça. Écouter de la musique japonaise, se mater des animes et des films en VOST, c’est bien joli, mais pour ce qui est de permettre d’acquérir un bon niveau…
Après, avec le recul, je m’aperçois tout de même que cela, associé à des retours sur le Minna no Nihongo, a permis de construire des fondations. Mais celles-ci sont fragiles, pas vraiment profondes, ne permettant pas de bâtir une maîtrise digne de ce nom, c’est-à-dire donnant la possibilité de mater des films sans sous-titres, de lire des mangas dans le texte original, ou encore de converser.
Et on peut avoir vécu un bon paquet d’années avec une Japonaise, ce n’est pas ça qui va faire progresser comme par magie. Le train-train quotidien en France a eu raison de ma volonté de parler en japonais, et ce n’est pas l’avoir entendue parler dans sa langue aux enfants qui a vraiment permis de m’en imprégner.
Longtemps, je me suis dit que cette méconnaissance n’était finalement pas si grave. Quand on retournait au Japon, la compréhension imparfaite permettait de nimber le Japon d’une aura de mystère persistant, et j’aimais assez cela. Sans compter qu’à chaque fois que je revenais au Minna non Nihongo, recommençant les leçons depuis le début, me farcissant toujours les mêmes dialogues, les mêmes listes de vocabulaire, tout cela me donnait assez rapidement la nausée.
Et puis, voilà, je ne sais pourquoi, après avoir fait un long détour par un univers médiéval dans lequel je me trouvais bien (et auquel je reviendrai), je suis davantage revenu au Japon, notamment à son cinéma, et l’idée, puis l’envie, me sont venues de tenter de nouveau une incursion dans la langue, si possible plus poussée, cette fois-ci.
Une nouvelle fois, j’ai ressorti le Minna no Nihongo, avant de me rendre compte que ça allait de nouveau coincer. Mais que faire d’autre ? J’avais tenté à une époque les numéros de Mangajin, magazine amateur qui permettait de décortiquer les mangas dans le but de mieux comprendre le Japonais. Le problème est que les mangas n’étaient pas forcément enthousiasmants, tout comme la perspective d’avoir les passages traduits en américain.
Du coup, j’ai un peu zoné sur Youtube, histoire de voir s’il se trouvait d’autres moyens. Et là, surpise ! stupéfaction ! coup de tonnerre ! En vérité les amis, je vous le dis, on vit une époque formidable ! Les moyens les plus funs sont désormais à disposition pour vous faciliter l’apprentissage, et même le rendre addictif. La méthode a désormais un autre nom que « Minna no Nihongo » : immersion. Lire directement des mangas en japonais, avec une extension nommée Yomitan, ou bien visionner des épiodes d’anime sur un lecteur nommé Asbplayer, le tout connecté au fameux Anki, logiciel de flashcards dûment paramétré pour avoir des cartes sexy, faciles à mémoriser :
Image tirée de l’épisode spécial de Minna ! Esper dayo ! de Sion Sono. Check la petite icône avec le triangle : oui, Asbplayer permet d’envoyer à Anki un fichier audio correspondant à la réplique !
Le tout est de ne pas choisir non plus des œuvres par trop difficiles. Ici, sachez qu’il existe jpdb.io, site qui permet d’associer un anime à un niveau de difficulté. C’est ainsi que je suis actuellement plongé dans Tokyo Magnitude 8.0 et que je m’aperçois que, petit à petit, mon cortex s’imprègne de vocabulaire, de structures de phrases, de kanjis. Et c’est assez grisant car cela permet de dédramatiser la langue, de sentir qu’une sorte de légo mental est en train de se mettre en place et qu’il y a fort à parier qu’à un moment, un déclic se fera pour produire mes propres phrases à l’oral.
On n’en est pas encore là. Pour l’instant, ça reste besogneux, mais je poursuis mon bonhomme de chemin, venant de découvrir le logiciel Mokuro, me permettant de lire des mangas en japonais et de les décortiquer avec la prise en charge de Yomitan. Assez sympa que de lire ainsi de courtes histoires de Crayon Shin Chan (ouais,on va éviter pour l’instant les mangas verbeux de type Death Note).
Je multiplie donc les approches. Après avoir terminé Tokyo Magnitude 8.0, j’enchaînerai probablement avec un drama, là aussi pas trop difficile.
Enfin, il y a aussi l’exercice consistant à formuler mes propres phrases à l’écrit. Ici, le travail associé à l’expertise correctrice d’une I.A. permet là aussi de mieux saisir les subtilités de la langue. Je me souviens de l’époque où, dubitatif devant la structure grammaticale d’ubne phrase, j’entreprenais une besogneuse recherche pour la comprendre, souvent en vain. Pour ça aussi, les moyens actuels permettent de gagner en efficacité. Et c’est ainsi que je livre la suite des aventures de Takeshi, trentenaire cinéphile et puceau, et de Mayumi, pour ainsi dire la libraire de mes rêves. Cette fois-ci, je vire les lignes en romaji. Quant aux kanjis, one more time, la baguette magique se nomme Yomitan !
まゆみの部屋。午後六時すぎ。
鏡の前で、まゆみは静かに立っていた。
ワンピースを体にあてながら、少し首をかしげる。
「これ、すこし きついかも……でも、すき。」
胸のあたりを軽く引っぱってみる。
形がよくわかる。ちょっとだけ、どきどきする。
「……たけし先生、見るかな? えっち……かな……」
まゆみは顔を赤くしながら、鏡の中の自分を見つめた。
自信と不安がまざった顔。
下着を選ぶとき、手がとまった。
ふと、小さな声が心の中にささやく。
「だめよ、まゆみ。そんな女じゃないでしょう?」
「でも…でも、たけし先生には見えないし……!」
「そんなの、分かんないでしょ?」と, いたずらっぽい声が返した。
鏡の前でくるっとまわって、髪を整える。
胸をすこし持ち上げて、ため息をつく。
「わたし……いつから こんな バッド・ガールに なったのかな……」
壁の本棚に目をやると、そこには『Suzuki Izumi』の名がある。
まゆみはくすっと笑った。
「スズキ・イズミ……あなたの小説も、すこし やばかったよね……」
パンプスをはきながら、まゆみはつぶやいた。
「武志先生……二十歳の処女の女の子とデートするんですよ。紳士らしくしてくださいね。」
十歩も歩かないうちに、ふと彼女の頭に浮かんだ。
「でも、本当にTバックなんて履いてよかったのかしら…?」
つづく
Traduction :
La chambre de Mayumi. Un peu après 18h.
Debout devant le miroir, Mayumi se tenait immobile.
Elle appliqua sa robe contre elle et pencha légèrement la tête.
« Celle-ci est peut-être un peu serrée… mais je l’aime bien. »
Elle tira légèrement sur le tissu au niveau de la poitrine.
On en devinait bien la forme. Elle sentit son cœur battre un peu plus vite.
« …Takeshi sensei va voir ça ? N’est-ce pas un peu trop… osé ? »
Rougissante, elle fixait son reflet.
Un visage partagé entre assurance et malaise.
Au moment de choisir sa lingerie, sa main s’arrêta.
Une petite voix lui soufflait :
« Non, Mayumi. Tu n’es pas ce genre de fille.
— Mais… mais… de toute façon Takeshi ne le verra pas !
— Ça, tu n’en sais rien, lui répondit une voix plus malicieuse.
Elle tourna sur elle-même devant le miroir, réajusta ses cheveux.
Souleva un peu sa poitrine, poussa un soupir.
« Depuis quand… suis-je devenue une Bad Girl ? »
Son regard glissa vers l’étagère où figurait le nom Suzuki Izumi.
Mayumi esquissa un sourire.
« Toi non plus, tes romans n’étaient pas très sages… »
Enfilant ses escarpins, elle murmura :
« Professeur Takeshi… c’est avec une fille vierge de vingt ans que vous avez un rendez-vous. Comportez-vous comme un gentilhomme, d’accord ?»
Elle n’avait pas fait dix pas qu’une réflexion l’assaillit :
« Mais vraiment, ai-je bien fait de mettre un string ?»
À suivre…
« immersion » ; « Yomitan » ; « Anki » ; « Asbplayer » ; à première vue j’ai l’impression de déambuler dans les couloirs d’Exit 8. Ça a pourtant l’air attrayant comme méthode.
Ça l’est. Après, ce n’est pas magique non plus, ça demande du temps quotidien (j’essaye de maintenir deux heures par jour). J’ai aussi oublié de mentionner des podcasts sur youtube par des natifs, qui parlent en marquant bien la structure de leurs phrases et avec un vocabulaire accessible. Tiens, comme ce type :
https://www.youtube.com/watch?v=rTZPcB9hzjQ
Bref, il y a de quoi faire, faut juste se discipliner.