Nihon no oto #8 : contre le boucan des cigales : la fūrin

L’été, on l’a vu, entendre les cigales faire leur boucan n’est pas toujours charmant car cela va de pair va avec une certaine chaleur, chaleur qui n’a rien d’apaisant au Japon.

Mais il est un autre bruit qui, lui, peut avoir l’effet inverse. Imaginez, vous êtes dans le salon d’une maison typiquement japonaise. Vous êtes affalé sur les tatamis essayant de lire un bouquin quelconque mais vous avez bien du mal tant il fait chaud. Vous pourriez mettre la clim’ bien sûr, mais comme il est quinze heures de l’après-midi et que vous êtes tout seul, vous avez quelques scrupules à mettre en branle une débauche d’énergie rien que pour vous. Du coup vous avez mis un ventilateur, ouvert les portes fenêtres en espérant que le vent décide de pénétrer à travers la maison.

Mais rien ne se produit. Il fait toujours aussi chaud et vous en êtes déjà à votre cinquième glace garigari-kun que vous vous mettez illico à transpirer à travers les pores de votre épiderme. Vous êtes sur le point d’angoisser sévère lorsque retentit subitement ce bruit :

Et tout de suite, Ô miracle ! vous vous sentez mieux. Doshite ? Parce que le bruit en question vient d’une fūrin (風鈴, d’après les kanjis signifiant « vent » et « cloche ») qui a été accrochée à proximité d’une des fenêtres que vous avez ouvertes. A l’origine servant à protéger les temples des mauvais esprits, on les utilise maintenant surtout comme un placebo sonore pour vous donner l’illusion de la fraîcheur. Et ça fonctionne assez bien. A l’appel non désiré de la chaleur que ces maudites cigales créent avec leurs cymbales, c’est l’appel bienfaisant du vent qui se lève qu’émettent ces petites cloches que l’on peut acheter en verre, en céramique ou en métal, et desquelles pendent un petit morceau de papier où est inscrit un haïku la plupart du temps.

Moi, quand je les entendais, je savais que je pouvais alors ranger mon bouquin, prendre une part de suika dans le frigo, la déguster tout en savourant les sons aigus de la furin, puis sortir pour une balade en vélo à travers les rizières ou jusqu’au centre-ville de Miyazaki. Il y aurait bien un peu de sueur à pédaler, oui, mais avec la brise détectée par la furin, le plaisir allait presque transformer le vacarme des cigales en douce mélopée.

Depuis le temps, c’est évidemment un petit souvenir que j’ai ramené à la maison. Un peu comme pour le bansho, le temps de sa résonance agit à chaque fois comme un délicieux dépaysement.

Sur ce je vous laisse, j’ai prévu aujourd’hui de faire pour la première fois des melonpans et je vais enregistrer la cuisson avec mon micro afin de voir s’il n’y aurait pas un son pouvant servir de base à un article. Si cela ne donne rien de concluant, j’aurai toujours la consolation de les bouffer.

 

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Un Commentaire

  1. Merci Olrik pour cette série (音) estivale !
    Seijoliver

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