l’Amant (Ryuichi Hiroki – 2004)

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Hanako conclut avec trois hommes, le jour de ses 17 ans, un contrat pour le moins crapoteux : pendant une année, elle sera leur amante à tous les trois et… ils auront le droit de lui faire l’amour à volonté. Evidemment en perte de repères, Hanako se prête d’abord à ce petit jeu autant avec dégoût que nihilisme…

D’emblée une précision s’impose. Si c’est le genre de scénario qui vous fait frémir, si vous imaginez que le film va être prétexte à une collection de scènes salaces façon mauvais pinku libidineux, eh bien vous avez tout faux. Et du coup, les amateurs de scènes de fesses aussi. Rappelons que l’on est chez Ryuichi Hiroki, certes ancien réalisateur de pinku mais aussi l’auteur de Vibrator, de It’s Only talk ou encore de M, films dans lesquels le sexe intervenait de manière ponctuelle et surtout illustrait le malaise des êtres (surtout féminins) qui s’y rencontraient. Par ailleurs le film est une adaptation d’un manga créé par une femme, Naito Yamada. Pour le brûlot misogyne, on repassera donc.

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Moins chaleureux que Vibrator dans lequel des morceaux de folk/pop/rock permettaient de réchauffer un peu l’âme dans un paysage hivernal, l’Amant nous plonge dans un univers urbain, terne, aux couleurs quasi désaturées, sans chansons consolatrices (à l’exception notable d’un morceau intervenant au milieu du film et d’un autre à la fin), sans sourires. Vie de merde donc que celle d’Hanako qui doit écarter les jambes à tout moment pour trois hommes qu’elle doit appeler A, B et C, et qui lui ont même donné un prénom pour son rôle de maîtresse collective, puisque Hanako n’est pas son vrai prénom mais renvoie à celui d’une autre mystérieuse jeune fille. Vie de merde aussi du fait d’une mère qui s’inquiète assez peu des absences de sa fille, ou d’un viol qu’elle subira dans les toilettes d’un cinéma. Alors qu’elle se trouve à la frontière entre deux âges, que l’on suppose que son passé et son présent n’ont jusqu’à présent été guère heureux, on se demande ce qui va bien pouvoir donner de l’intérêt à son avenir. Au-début du film, Hanako se fait tatouer une paire d’ailes d’ange sur le dos, comme une amulette pour la protéger de son contrat à venir et de la morosité de son existence. Mais est-ce que cela suffira ?

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En fait, on s’en doute lorsque l’on connaît un peu l’œuvre d’Hiroki, le film va tracer une quête intérieure qui trouvera des réponses, des solutions grâce à la rencontre de l’héroïne avec d’autres personnages. A commencer par ces A, B et C moins amoraux qu’ils pourraient le faire croire, eux aussi atteints d’un sacré spleen mais pas non plus le même que celui d’Hanako. Alors que cette dernière est taraudé par le présent et l’avenir qui l’attend, eux, quadragénaires avancés, c’est plutôt l’écoulement du temps et leur passé perdu qui leur font mal. Hanako en prendra conscience lors d’une belle scène de feux d’artifice dans laquelle se fera entendre la première chanson (Hikari to Kage, de Polaris). Et puis, il y aura plus tard un garçon de son âge qui en pincera pour elle et qui sera prêt à jouer au chevalier blanc alors qu’elle affirme être enceinte après son viol et qu’il découvrira son contrat avec trois hommes. Découvrant les souffrances des autres mais aussi son pouvoir et arrivant au terme de l’année qui l’a liée au destin de A, B et C, Hanako peut enfin s’apaiser et sourire : son avenir n’apparaît plus aussi terne. Et ses trois anciens comparses, malgré la fin de leur contrat, pourront eux aussi souirire, mais pour une raison que je vous laisserai découvrir.

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7/10

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2 Commentaires

  1. Le scénar a l’air vraiment particulier, j’ai bien aimé Vibrator et M, je vais continuer les films d’hiroki.

    • « It’s only talk » aussi, toujours avec le même motif de la jeune femme perturbée psychologiquement et sexuellement, est pas mal non plus

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