Summer is coming

En fait, l’été est déjà est là, mais pour moi, il commencera vraiment dans quelques semaines lorsque je retrouverai un certain pays. Déjà l’excitation est à son comble et la projection mentale de ce que j’y ferai, intense. C’est finalement l’avantage de ne pas habiter au Japon et de se retrouver condamné à n’y aller que tous les 2-3 ans : l’éloignement spatial et temporel fait son effet et le plaisir « d’être là » est alors infiniment plus fort à celui « d’y habiter ».  Le temps n’y sera pas à volonté mais bien compté. Et au plaisir de se fondre dans le temps présent s’ajoutera illico la tristesse de le voir se transformer en temps perdu… avant qu’il ne se mue plus tard en temps retrouvé avec la provisions de souvenirs sur cartes mémoires que j’aurai eu le soin de constituer.

Bref, le temps de quelques semaines, je me retrouverai dans un compte à rebours où le moindre parcelle de temps, de la journée à la seconde, sera consacrée à une captation sensorielle qui me fera dire à chaque fois :

« Bon Dieu ! que c’est bon d’être ici ! »

Finalement, je me dis que ces retrouvailles cycliques me conviennent en ce qu’elles me permettent de reconstituer des illusions qui auraient pu être défraîchies à la fin d’un séjour. Sorte d’hymen mental qui me permet de me lover réellement ou virtuellement dans le pays de mes fantasmes. Il faudra bien un jour que je mette sur le tapis cette protection en me lançant dans un séjour à plus long terme. Quand je vois ce que permet ma profession, il y aurait bien une possibilité. Mais il est encore un peu tôt pour ça…

Bref, le temps n’est pas arrivé où je serai blasé du Japon. Et encore moins celui où je ne ressentirai plus le désir de déverser en ces pages le trop plein de plaisir que m’apporte ce pays. Et même si certaines expériences ont pu être décevantes, elles ne pèsent pas lourd face à toutes celles qui, alors que je suis au milieu de la trentaine, me donnent à penser que j’y ai vécu les moments les plus forts de ma vie. L’heure sera donc toujours à l’émerveillement et pas au ton cafardeux de celui qui a perdu ses illusions.

En attendant, voici une liste toute personnelle des petites choses indispensables que je me promets bien de retrouver ou de faire le plus vite possible une fois que j’aurai posé mes basque là-bas.  La liste n’est pas exhaustive, j’en oublie sûrement, mais elle reflète assez bien les goûts de votre serviteur. Si vous pensez que j’en ai oubliées, ou si vous en avez quelques unes en tête qui mériteraient d’être évoquées, balancez !

1) Humer les odeurs de nourriture dans les rues d’un centre ville
2) Les haltes aux convinis pour la pause 4H après une promenade harrassante en plein cagnard. On veillera alros à s’acheter un de ces petits pots de glace à la vanille de marque Meiji.
3) Prendre son vélo après dîner pour aller au joli sento qui se trouve dans le centre à 20 minutes (complétement con car il faut bien revenir et on a largement le temps de retranspirer et de puer le fénec arrivé à domicile. Mais c’est pour le plaisir de faire une virée nocturne à vélo et de choisir des chemins compliqués pour le retour).
4) L’air climatisé des magasins après la chaleur de l’extérieur.
5) La chaleur de l’extérieur après l’air climatisé des magasins.

6) Flâner dans les Book-off pour y dégoutter des mangas inconnus ou des photobooks bon marché.
7) Prendre le petit-déj’ avec les gosses en se matant les programmes pour la jeunesse de la NHK.
8) Se rendre dans un toys’r’us avec son garçon (enfin, maintenant « ses ») pour acheter des choses aussi essentielles qu’une figurine en plastique de Kamen Rider ou un énième jouet Anpanman (ça, c’était avant. En ce moment, c’est plutôt l’obsession Saint Seiya)
9) La petite sieste de l’après déjeuner, sur les tatamis et le ventilateur juste à côté, avant de repartir en ville pour une séance électrique de street shooting.
10) Les matsuris quels qu’ils soient : de quartier, moyens ou importants, du moment qu’il y a une ambiance chaleureuse, des jolies filles en yukata et des trucs à bouffer.

11) Le combo Asahi-shochu lors du dîner pour montrer à son beau-père que son gendre a lui aussi une bonne descente. Après le dîner, petite sortie nocturne au distributeur ou au combini du coin pour s’acheter une canette glacée de café au lait.
12) Déambuler dans des rues ordinaires, en croisant des petites grands-mères ou des écoliers revenant de l’école.
13) Glander dans un cybercafé. Pas forcément longtemps, juste le temps de faire ses mails, de profiter du confort hallucinant et de siroter des boissons gratuites.
14) Les bains de foules électriques dans Tokyo ou Osaka, le reflex à la pogne.
15) Faire un yakiniku le soir en terminant par un feu d’artifice.

16) Manger de l’anguille.
17) Recevoir dans la rue de ces petits signes amicaux et spontanées d’autochtones tout étonnés de voir un gaijin prendre des photo dans leur quartier.

18) Se consumer de fureur consumériste à l’Aeon qui par chance se trouve non loin de la maison.

19) Se réveiller en se disant que c’est parti pour une nouvelle journée au Japon et que ça, c’est cool.

20) Enfin, admirer la démarche heurtée et indiciblement sexy des bijins l’été. La seule chose qui mérite de sortir de chez soi pour affronter une chaleur à décorner des boeufs (euh…).

Lien pour marque-pages : Permaliens.

10 Commentaires

  1. Il manque les 16 à 19. 😛
    C’est vrai que les gaijin qui vivent sur place se lassent souvent très vite alors qu’en faisant des voyages réguliers on se tape pas les inconvénients du quotidien japonais. Une solution intéressante.
    Sinon bah ça donne bien envie d’y retourner forcément, jalousie toussa…

  2. Merde, j’a trompé 🙁
    Ça y est , j’ai réparé.
    Certains expat’ diront sûrement que leur engouement pour le Japon ne faiblit pas après plusieurs années. Après, je doute que l’émerveillement des premiers instants ne se soit pas un peu dilué au fil du temps. Et quand je parle d’émerveillement, cela ne concerne pas forcément les choses les plus spectaculaires. Juste celui d’admirer des visages, des fils électriques et des ciels que l’on n’a pas ailleurs. Le jour où je ne ressentirai plus rien devant cela, je me dirai qu’il est peut-être temps d’arrêter d’y aller.
    Avant que d’éventuels expats ne me tombent peut-être dessus à bras raccourci, je précise que c’est une vision personnelle basée sur un amour de la contemplation parfois hardcore. Je me doute que plein de personnes ont encore le feu sacré pour ce pays après pas mal d’années passées là-bas.

    Sinon bah ça donne bien envie d’y retourner forcément,
    J’espère bien parvenir à amplifier cette envie avec les vidéos que je compte prochainement faire avec mon nouveau joujou…

  3. Argh !! Happy motherfucka’.:)
    Elle fait envie la liste, et certains numéros évoquent quelques souvenirs bien précis, et d’autres des choses que je n’ai pas eu l’occasion de faire (du vélo dans la ville à la tombée de la nuit). J’aurais mis le son des cigalles, si singulier.
    Moi ça va faire 7 ans là…. ça commence à dater….
    Ca promet encore de beaux articles à venir en tout cas !

  4. Yep ! Le son des cigales s’impose :
    21) Le son des cigales qui par ses vibrations fait décoller sans effort le cérumen de vos portugaises.
    Et j’en rajoute un autre qui me revient :
    22) Barbotter dans l’eau chaude du Pacifique, sur une petite plage où se trouvent seulement 2-3 péquins et une poignée de surfeurs. Tenez, celle-ci par exemple, pour ainsi dire MA plage :
    https://maps.google.fr/maps?q=miyazaki&hl=fr&ie=UTF8&ll=31.709376,131.456244&spn=0.007138,0.013937&sll=46.75984,1.738281&sspn=11.774711,28.54248&t=h&hnear=Miyazaki,+Pr%C3%A9fecture+de+Miyazaki,+Japon&z=17

    7 ans ? Ouch ! Déjà qu’au bout de trois je suis à l’agonie ! Ta prochaine risque d’être une claque comme aux premiers jours.
    Sinon, le vélo au Japon, c’est le bien, et pas que le soir. Gros souvenir d’une après-midi à Kyoto passée sur une selle de vélo à aller aux quatre coins de la ville.

    • Ah oui les plages japonaises. 40 péquins à Kagoshima quand la ville compte 600k habitants. 3 maîtres nageurs et 4 barques qui circulent.
      Ou personne à Ibusuki, plus au sud, tous enfermés dans leurs hôtels.

      Ils sont fous ces japonais.

  5. Ah, ça me plonge déjà dans l’ambiance, à ceci près que je prendrai ma glace Meiji au thé vert (exotisme, quand tu nous tiens !).

    Elles sont belles les photos de l’article (et pas seulement les photos). J’ai hâte de voir les vidéos à venir !

    A la liste, j’ajouterai les trains.
    Par exemple, le soir dans un petit quartier en campagne, quand le passage à niveau s’abaisse en faisant Ting Ting et qu’un wagon unique passe cahin-caha avant disparaître dans l’obscurité.

  6. Tu as raison, le ting ting des passages à niveau fait partie de cette panoplie sonore qu’on se plaît à retrouver. Tiens, un autre me revient en tête : les mélodies aux passages piétons pour les aveugles. Et « ce n’est qu’un au revoir » à la fermeture des magasins. Décidément, il y aurait presque une idée de série d’articles sur tous ces sons, faudrait que je me penche là-dessus. Ça me rappelle aussi que j’ai un docu à voir, « Soundscape Kyoto », sur les sons de Kyoto.
    Allez, un dernier pour la route :
    http://www.youtube.com/watch?v=sLr_bEOuydY
    Du miel à mes oreilles.

  7. Bon puisque je suis l’expat de service là, je vais te tomber à bras raccourci… Non je déconne.

    En fait, joli liste (et jolies photos) qui me rappelle beaucoup les choses de la vie quotidienne que j’adorais quand je venais en vacances moi aussi. Et quelque part, certaines me manquent un peu maintenant, soit parce que je ne les fais plus (ah aller au cyber café le soir, profiter de l’ambiance feutrée du lieu sirotant quelque boisson si bonne car gratuite) soit parce qu’elles sont devenues « trop » quotidiennes et donc « normales ».

    Être devenu « expat » (même si je hais le mot) change la donne. Ce que l’on vit n’est pas mieux, ni moins bien, juste différent. Certes les choses sont moins intenses, moins spéciales, mais c’est remplacé par le fait de pouvoir les faire quand on veut comme on veut en quelques sorte.

    Sinon je te souhaite bien entendu un excellent voyage (il me tarde d’en lire quelques lignes et d’en voir quelques photos) et si jamais tu voyages dans le pays lors de ton séjour et que tu veux voir du nouveau, puis-je te conseiller une région en particulier… (eh, eh, tu te doutes de laquelle).

    Cheers.

  8. Tu résumes bien les deux situations. « les faire quand on veut comme on veut » qui s’opposerait dans mon cas à « les faire pleinement, frénétiquement parce qu’on est là juste un temps donné ». Deux types de plaisir différents effectivement.
    Pour Shikoku, figure-toi que j’y ai pensé lors de la préparation de ce voyage. Le problème est que c’est toujours l’Arlésienne avec cette île. A chaque fois c’est « allez ! c’est dit ! Cette fois-ci on passe un bout de temps à Shikoku. » Et puis voilà, ma femme prévoit d’aller ici parce qu’elle veut y voir des amis, là parce qu’il y a de la famille et au final, pas de journée à consacrer à shikoku sur les sept que le Japan Rail Pass nous permet. Du coup, ce sera pour une autre fois.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.